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LA GRÈCE
ET
LA QUESTION D’ORIENT
DEPUIS LA CONFÉRENCE

C’est par habitude et par routine qu’on parle encore de la question d’Orient. Tous ceux qui ont quelque peu étudié les affaires de l’Orient européen savent bien que, depuis une vingtaine d’années, surtout depuis la guerre de Crimée et le traité de Paris de 1856, il n’y a plus, à vraiment parler, de question d’Orient. Il n’y avait de question d’Orient que lorsque les diverses puissances européennes pouvaient hériter de la Turquie, et que les ambitions rivales se disputaient cette succession, avant même qu’elle fût ouverte. L’Autriche a pu l’espérer un instant après les victoires du prince Eugène, au commencement du XVIIIe siècle; mais la Russie, surtout depuis les conquêtes de Catherine II jusqu’à la fondation du royaume de Grèce, a semblé être l’héritière prédestinée et inévitable de la Turquie.

Il peut paraître singulier que je fasse de la fondation du royaume de Grèce la première pierre d’achoppement à l’ambition de la Russie en Orient, le premier obstacle à son entrée à Constantinople, car enfin la Russie a grandement contribué à la fondation du royaume hellénique. Comment croire qu’elle ait aidé à borner elle-même sa fortune en Orient? Nous expliquerons un peu plus loin l’idée que nous nous faisons de la politique de la Russie en Orient,