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tion, combien en caisse, ce que valent son portefeuille, sa réserve métallique, combien elle possède à Paris, combien dans les succursales. Quand on pense aux millions qui se brassent chaque jour à la Banque, aux opérations nombreuses dont elle est le théâtre, on est confondu que les comptes soient apurés tous les soirs. C’est là le triomphe de l’ordre, de l’activité et de la prudence.


IV.

Presque tous les bureaux où se préparent et s’exécutent les différentes opérations de la Banque de France sont munis d’une caisse qui, selon les besoins qu’elle doit satisfaire, est appelée caisse de recette ou caisse de dépense. Ces caisses partielles sont les succursales de la caisse principale, qui, pour éviter l’encombrement, leur a délégué une partie de ses pouvoirs. Chaque matin, avant l’ouverture réglementaire de la Banque, les caissiers se réunissent à la caisse principale, où on leur remet les sommes dont ils ont besoin pour leur exercice quotidien; ils comptent les billets, les appoints en monnaie, et enferment le tout dans un solide portefeuille qu’ils font porter dans leur bureau par un garçon qui les accompagne. Les caisses sont aujourd’hui disposées de telle sorte qu’on peut s’y rendre sans franchir les cours. Autrefois il n’en était pas ainsi, et le caissier s’en allait seul, portant sous le bras les fonds nécessaires à la dépense de la journée. Une tentative violente fit prendre des précautions plus sérieuses. Au mois de décembre 1837, M. Bouron, caissier, ayant en main un carton qui contenait 1,100,000 francs en billets de banque, au sortir de la grande cour, qu’il était obligé de traverser, fut accosté dans un couloir étroit par deux individus qui se jetèrent sur lui et voulurent lui arracher son portefeuille. Il se défendit, appela au secours, tomba, entraînant ses agresseurs avec lui. Selon une vive expression d’un rapport de police, ils pataugeaient à travers les billets de banque. Un des malfaiteurs put s’échapper, l’autre fut saisi et conduit chez le commissaire de police, où il se brûla la cervelle. Cette aventure fut un avertissement sévère, et maintenant les caissiers sont toujours escortés par un garçon solide, et ne se rendent à leur bureau que par les salles intérieures de l’hôtel. Le maximum des sommes qu’un caissier peut donner est limité, et celles qui dépassent 20,000 francs doivent être acquittées par la caisse principale. Tous les jours, lorsque les bureaux sont fermés, les caissiers secondaires rapportent à la caisse principale le reliquat de la journée, de sorte que chaque soir tout l’argent, tous les billets de la Banque sont centralisés au même endroit, sous la même surveillance, sous la même responsabilité.