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avoir à l’utiliser en détail. La seule différence à considérer, c’est celle qui existe avec la valeur intrinsèque des 8 shillings dont la pièce de 10 francs serait l’équivalent. Or cette différence est de 3/4 pour 100, comme celle de la livre sterling par rapport à la pièce de 25 francs. Est-ce là une différence suffisante pour troubler toutes les relations, modifier sensiblement les contrats et empêcher que la nouvelle monnaie ne cadre dans une certaine mesure avec le système anglais ? Nous ne le pensons pas.

On a proposé de frapper la nouvelle monnaie simplement comme une monnaie d’appoint, qui ne serait reçue dans les paiemens à l’intérieur que jusqu’à concurrence de 4 livres sterling. C’est en effet un moyen d’éviter les embarras qui résulteraient des droits acquis; mais, allât-on jusqu’à lui donner une existence légale absolue, cela ne serait pas encore une difficulté. On recourrait alors pour les contrats existans à la compensation. En somme, rien n’est plus juste. On change la valeur de la monnaie avec laquelle le créancier devait être payé, il est naturel qu’on lui accorde une compensation. Nous savons bien qu’il y a des hommes d’une certaine autorité qui ont prétendu, comme M. Shermann dans un rapport au congrès des États-Unis, que, l’état ayant toujours le droit d’établir un impôt sur les propriétés privées, il pourrait à ce titre supprimer la compensation. Cette théorie est trop rigoureuse. L’état a incontestablement le droit d’établir des impôts sur les propriétés privées, et il peut en frapper les contrats comme les autres choses; mais il doit le faire dans l’intérêt général et non dans celui du débiteur exclusivement, au préjudice de son créancier, comme cela arriverait par la suppression de la compensation. Nous savons encore que, lorsque la Hollande, en 1839, a diminué le poids de sa monnaie de 1 1/2 pour 100, elle n’a accordé aucune compensation. Nous aimons mieux l’exemple de la France, qui, lors de la conversion de l’ancienne livre tournoi en francs, établit une échelle de conversion pour tous les contrats en cours d’exécution. La différence était de 1 l/4 pour 100, 100 francs valaient 101 l/4 livres tournois. Il est vrai que la compensation, facile pour certains contrats, ne le serait pas pour tous. On ne pourrait pas l’établir pour ceux inférieurs à 5 shillings, car elle ne représenterait pas même la moitié d’un penny. Il y aurait dans ce cas une perte; mais quels sont dans une société les contrats dont l’importance ne dépasse pas 5 shillings? Ils sont très peu nombreux, et ils n’ont jamais qu’une durée bien éphémère. Il suffirait de les renouveler pour les mettre en rapport avec la nouvelle monnaie. Quant aux autres, rien ne sera plus facile que d’établir cette compensation. La Banque d’Angleterre s’en chargera pour les titres de rente, les sociétés industrielles ou finan-