Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/537

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

été l’organisateur de la dernière mission diplomatique envoyée à Théodoros, et c’était lui qui avait désigné au choix du gouvernement anglais le chef de cette mission, M. Rassam. Nul homme ne possédait sur le pays des notions plus exactes, et n’était mieux que lui à même de bien conduire ces opérations préliminaires. La plupart des chefs de service du corps expéditionnaire accompagnaient le colonel Merewether. Le 2 octobre, la reconnaissance touchait les rivages de la Mer-Rouge. D’abord on crut pouvoir faire du port de Massouah le point de débarquement ; mais il fut tout de suite constaté que le peu d’étendue de la rade et l’insuffisance des ressources en eau ne permettaient pas de s’arrêter à cette idée. La côte fut explorée ; les indications des voyageurs signalaient différentes baies ouvertes entre l’île de Massouah et le détroit de Bal-el-Maudeb et pouvant donner accès sur le plateau d’Abyssinie après une marche plus ou moins longue à travers les plaines basses et brûlantes qui bordent le littoral. Les difficultés et les périls d’une pareille traversée firent choisir le point le plus voisin du plateau. On s’arrêta donc à la baie d’Annesley, située par environ 15° 15’ latitude nord et 37° 20’ longitude est de Paris, à quelques lieues au sud de Massouah.

La rade d’Annesley, ouverte seulement au nord, forme un excellent mouillage, elle est assez vaste pour abriter des flottes considérables. Sur le rivage, une plaine de cinq ou six lieues de largeur s’étend jusqu’au pied de la muraille orientale du plateau abyssin. Formée de sables recouverts en partie d’une herbe très courte et de fourrés de broussailles, cette plaine, malgré la chaleur torride qui y règne, est exempte des maladies terribles trop fréquentes dans les pays tropicaux. Malheureusement elle manquait d’eau douce, et ce ne fut pas là une des moindres difficultés que rencontra l’armée anglaise pour l’établissement d’un camp. Il fallut y suppléer en installant des appareils distillatoires tant à bord des navires que sur des îlots artificiels spécialement construits pour cet usager La dépense qui en est résultée a été considérable, et l’on peut croire que l’usage de cette eau distillée n’a pas été étranger à la mortalité qui sévit sur les animaux au commencement de l’expédition. La côte était basse et plate, il était indispensable d’établir des cales de débarquement. Comme les matériaux manquaient, il fallut, pour édifier une première jetée, envoyer des barques chercher des pierres de l’autre côté de la rade et fabriquer des fascines avec les broussailles coupées sur le rivage. Plus tard, une seconde jetée sur pilotis fut installée avec des bois apportés de l’Inde. Ces deux jetées n’avaient pas moins de 300 mètres de longueur. On songea dès l’origine à relier par une voie ferrée le pied des