Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/636

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prélats qui sont présentement à Paris, les autorise à retourner dans leurs diocèses… L’empereur juge convenable que votre excellence ne dise pas d’abord qu’elle a reçu le bref, mais qu’elle se borne à annoncer que les députés envoyés à Savone lui ont donné de telles assurances des dispositions du pape qu’il n’est pas possible de conserver aucun doute sur l’issue de cette affaire. Cette marche aura l’avantage de débarrasser du concile et de laisser l’empereur maître d’agir selon les circonstances… Trois jours après que vous aurez licencié le concile, et quand plusieurs de ses membres seront partis, l’intention de sa majesté est que vous remettiez à son éminence le cardinal Fesch les deux lettres ci-jointes. L’une est du pape, l’autre des députés. L’empereur en a pris connaissance, et y a remarqué avec étonnement que le pape fait dépendre l’institution canonique des évêques du retour des cardinaux ; M. le cardinal doit en conséquence écrire au pape pour le déterminer à donner l’institution aux évêques, attendu qu’ils sont nommés depuis plus de six mois. Votre excellence voudra bien de son côté écrire aux évêques députés à Savone qu’aussitôt qu’ils auront fait expédier l’institution des évêques…, ils aient à revenir sur-le-champ à Paris, et au cas où le pape se refuserait à donner cette institution sans délai, votre excellence leur ordonnera de partir de Savone et d’être à Paris pour l’époque du retour de l’empereur, c’est-à-dire avant le 20 octobre, parce que, le concile s’étant séparé, la députation se trouve par cela même finie. Vous ne leur dissimulerez pas qu’il pourrait bien y avoir des objections contre la publication du bref en France… Sa majesté recommande à votre excellence d’avoir bien soin qu’on ne mette rien dans les journaux sur cette affaire[1]. »

Quarante-huit heures plus tard, l’empereur revenait de nouveau à la charge. « Je vous envoie, écrit-il à son ministre des cultes, l’original du bref du pape. Gardez-le, sans le communiquer à qui que ce soit… Je désire que les évêques se trouvent à mon arrivée à Paris, afin de voir le parti qu’il y aura à prendre. Il me semble que le meilleur serait celui-ci : regarder le bref comme non avenu (puisqu’il est adressé aux évêques, cela ne me regarde pas), et publier comme loi de l’état le premier décret du concile national, par lequel il se déclare compétent, et le second, en ordonnant leur insertion au Bulletin des lois pour les rendre obligatoires. Quant au bref, il serait envoyé aux évêques pour leur gouverne, sans aucune publicité. Cependant un bref ne peut pas être envoyé sans avoir été enregistré au conseil d’état. Il faut donc que le conseil enregistre

  1. Lettre de l’empereur à M. le comte Bigot de Préameneu, dictée à M. le comte Daru. Flessingue, 28 septembre 1811. (Cette lettre n’est pas insérée dans la Correspondance de Napoléon Ier.