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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/924

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à sa sainteté des malheurs qui lui seraient personnels. Nous connaissons trop son courage, sa patience, sa résignation héroïque, pour croire qu’elle puisse être frappée d’un pareil motif. Cependant nous la supplions de considérer que le mal du chef est le mal de tout le corps, et que l’église ne peut être bien administrée, si celui qui la gouverne ne jouit pas d’une liberté entière. Si la chaire de saint Pierre n’est plus l’oracle de l’église et la source des grâces spirituelles, si le pontife qui la remplit ne peut faire entendre sa voix aux évêques et aux fidèles, si l’église de Rome et le sacré-collège demeurent encore longtemps dans l’état où ils sont actuellement, on n’entrevoit pas comment il serait possible de donner un successeur à sa sainteté… La nomination de quelques évêchés aux environs de Rome peut-elle être mise en balance avec un aussi grand intérêt et avec tous les maux qui seraient la suite infaillible de la mésintelligence prolongée entre le pape et l’empereur ?… Quelle sera la consternation des fidèles, si leur attente est trompée, et si, en retournant au milieu d’eux, nous sommes réduits à leur apprendre que le pape a rejeté un traité qui seul pouvait mettre un terme aux maux de l’église[1] ! » Cette note fut mise par les cardinaux Sous les yeux du saint-père. Tous les membres du sacré-collège et l’archevêque d’Édesse lui-même auraient bien voulu que Pie VII cédât à la nouvelle exigence de Napoléon. Entre eux, la partie était fortement liée, et c’était sur cet accord, qu’il avait tant contribué à établir, que le préfet de Montenotte avait fondé ses principales espérances ; mais Pie VII rejeta absolument le projet de réponse qu’avaient rédigé pour lui ses soi-disans conseillers. Il leur dicta une autre note conçue dans un sens fort différent. Il n’y était pas d’ailleurs question d’un refus absolu et définitif.


« Dans la situation actuelle, disait le message que les cardinaux reçurent ordre d’adresser aux évêques, par suite de l’état des choses et de la pratique ordinaire du saint-siège, sa sainteté sent le devoir de réclamer l’aide d’un conseil convenable à l’effet de prendre une détermination sur cette question des évêchés de l’état romain et sur tant d’autres affaires qui sont d’une si grande importance. C’est pourquoi sa sainteté, souhaitant la paix de l’église et la réparation de ses maux, désireuse avant tout de tranquilliser sa conscience, vit dans l’espérance fondée que sa majesté voudra bien consentir à ce que toute détermination ultérieure soit différée au temps pu sa sainteté se trouvera en position d’exercer son ministère apostolique, et quand il aura près de lui un nombre convenable de ses conseillers ayant l’expérience et la

  1. Note adressée à MM. les cardinaux pour être mise sous les yeux de sa sainteté, 16 novembre 1811. — Cette note est signée par l’archevêque de Tours, l’évêque de Plaisance, l’évêque de Trêves et l’évêque de Nantes.