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la liberté a de nombreux avantages à côté de nombreux inconvéniens. Les universités américaines ne sont trop souvent que des fabriques de diplômes. La concurrence des écoles entre elles ne permet pas de retenir les élèves pendant un nombre d’années suffisant pour acquérir une forte éducation médicale. Les examens sont d’une facilité excessive, à tel point qu’on n’ose pas les rendre publics. En revanche, un grand nombre de jeunes docteurs, après avoir amassé quelque argent, reviennent s’asseoir sur les bancs pour compléter leur éducation. La concurrence d’ailleurs stimule le zèle des professeurs par l’espoir de la renommée et aussi par l’espoir d’un gain légitime. Ils ne s’endorment pas dans leurs chaires inamovibles comme des sénateurs sur leurs chaises curules. Ce que l’enseignement perd en profondeur, il le regagne en clarté, en vivacité, en intérêt. Même au point de vue de l’installation matérielle des écoles, l’industrie et la générosité privées font beaucoup plus que ne peuvent faire les dotations si restreintes que nous accordons à l’instruction publique sur les deniers publics.

Si à cette heureuse influence de la liberté nous ajoutions celle d’un contrôle régulier du gouvernement, nous aurions réuni les avantages des deux systèmes ; nous aurions relevé l’enseignement médical sans cependant l’asservir aux règles officielles et sans en faire un monopole. Les diplômes seraient conférés par des commissions nommées par l’état, sans que la liberté de l’enseignement souffrît cependant la moindre contrainte. Ces jurys d’examen tiendraient leurs assises à certaines époques et se transporteraient de ville en ville, comme ceux qui prononcent sur l’admission des candidats aux écoles spéciales. Tel est le système à la fois libéral et régulier que le Dr de Valcourt nous recommande, en s’appuyant sur l’expérience et sur l’opinion même du corps médical américain. Il nous semble que ses conclusions sont vraies, et nous conseillons la lecture de son livre instructif et judicieux à ceux de nos lecteurs que ce résumé trop court ne suffirait pas à convaincre.


ERNEST DUVERGIER DE HAURANNE.


Madame Gervaisais, par MM. Edmond et Jules de Goncourt, 1 vol. in-8o ; Librairie internationale


Le dernier roman de MM. de Goncourt reproduit les qualités et les défauts de ses devanciers. Les qualités, c’est dans les détails qu’on les rencontre, dans les nombreux épisodes, dans les descriptions qui le remplissent. Les défauts frappent principalement quand on considère l’ensemble de la composition, quand on analyse la thèse que les auteurs ont voulu défendre, les ressources d’invention dramatique qu’ils ont mise à son service. Ce livre est comme un opéra dont la musique n’est cas mauvaise et dont le libretto n’est pas bon. L’intrigue ne se pique pas de vraisemblance, elle languit, on ne la suit pas sans peine dans ses contradictions et ses méandres. En revanche, on a de temps en temps