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jourd’hui une douzaine de raies brillantes qui sont visibles dans le spectre des bords du soleil ; mais, chose curieuse et fort inattendue, ces raies lumineuses ne correspondent pas toutes à des raies noires du spectre ordinaire, ni à des raies brillantes des spectres métalliques connus. Quatre seulement coïncident par leur position avec des raies appartenant à l’hydrogène et qu’on retrouve parmi les lignes de Fraunhofer dans le spectre solaire ordinaire; une autre pourrait bien être l’une des lignes du magnésium; le reste semblerait indiquer l’existence de corps simples qui nous sont encore inconnus. Il y a parmi ces lignes de l’atmosphère solaire une raie jaune qu’on avait d’abord prise pour cette raie du sodium qui se glisse partout, qui s’introduit dans le champ du spectroscope malgré l’observateur, parce que toutes les poussières terrestres renferment des parcelles de soude; vérification faite, il s’est trouvé que la raie jaune du soleil est certainement d’origine différente. Ce qui est très remarquable, c’est que la lumière de quelques étoiles semble renfermer les mêmes rayons jaunes.

Tout récemment, M. Huggins est d’ailleurs parvenu à voir non-seulement le spectre des protubérances roses, mais la forme même de ces proéminences en les regardant au travers d’un verre rubis foncé; on peut donc prévoir le moment où les astronomes produiront dans leurs lunettes des éclipses artificielles qu’ils pourront étudier à loisir sans avoir besoin pour cela d’aller chercher des fièvres en Cochinchine. Dès aujourd’hui, on peut dire que les recherches spectrales nous ont plus appris en dix ans sur la constitution physique du soleil et des corps célestes en général que ne nous en a révélé l’emploi des plus forts télescopes pendant trois siècles. Elles ouvrent les plus vastes horizons sur l’origine et la formation des mondes, elles font découvrir des corrélations imprévues, des analogies surprenantes, elles étendent, si cela est possible, les bornes de l’imagination.

Le livre que vient de publier M. Henry Enfield Roscoe résume d’une manière fort attachante l’histoire et les dernières conquêtes de l’analyse spectrale. Il se compose essentiellement d’une série de conférences que l’auteur a faites devant la Société pharmaceutique de Londres. Il y a joint la reproduction d’un grand nombre de documens originaux empruntés aux publications les plus importantes sur la matière. Ce qui distingue l’ouvrage de M. Roscoe et ce qui le rend très recommandable, c’est l’abondance des planches et des tableaux numériques. On y trouve le catalogue des raies solaires de Kirchhoff, avec des planches tirées en quatre couleurs, les tables spectrales d’Huggins et d’Angström, la description détaillée des appareils usités, enfin tout ce qui peut être utile aux travailleurs.

Le grand atlas du spectre solaire de M. Angström n’est achevé que depuis l’année dernière; il résume un travail immense, exécuté à l’aide des