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argent obtenu, de renvoyer lady Portland, ne fût-ce que sous prétexte d’économies devenues indispensables. Ils promettent qu’on rendra les gardes, qu’on rendra les enfans ; mais ce ne sont là que des promesses. Aucunes conditions ne sont encore faites, aucunes garanties ne sont obtenues que nous serons moins maltraités quand les ministres auront atteint leur but. Je demande à la princesse si on est d’accord sur les gens à remercier. — Oui, me dit-elle, mais non sur ceux qui rentreront. — Exactement comme au temps du triumvirat romain ; on ne s’entend que pour proscrire. Je crois au fond que Sunderland conserve tout l’ascendant réel, et que Townshend et Walpole, en traitant avec lui, ne songent qu’à exploiter dans leur intérêt unique le crédit acquis par eux sur leurs altesses royales. Lord Cowper est profondément dégoûté de tout ce qu’il voit ; de plus sa santé se trouve altérée. Il part demain pour la campagne, et il y a fort à parier que, si on lui donne d’autres sujets de mécontentement, il m’emmènera d’ici. Bernstorff ni aucun des Allemands n’est au courant de ce qui se brasse. Le roi paraissait nier de très mauvaise humeur.

19 avril. — La princesse Anne est malade. Sa mère a fait demander au roi l’autorisation de la voir. Jusqu’à présent, elle n’a été admise auprès de ses enfans que le dimanche soir. Le prince paraît fort inquiet. La petite vérole s’est déclarée.

20 avril. — La princesse est allée deux fois à Saint-James. Notre service devient très pénible. Pas la moindre occasion de rien apprendre. La petite malade semble se rétablir.

22 avril. — Lord Cowper va d’abord chez Walpole, puis chez le prince. Walpole lui a montré la lettre de ce dernier, amendée par les ministres, et qui, définitivement résolue, partira demain. — Je commence à constater chez mylord l’intention très arrêtée de renoncer aux affaires.

Samedi 23 avril. — Fête de saint George, patron de l’Angleterre. La lettre du prince, portée au roi par lord Lumley, a été suivie d’un message du roi au prince, et ce dernier, montant aussitôt en chaise, s’est fait porter à Saint-James, où. sa majesté l’a reçu dans son cabinet. Le compliment du fils a été fort court, mais très respectueux, et promet une obéissance complète. Le père était fort troublé, très pâle, et n’articulait que des phrases entrecoupées au milieu desquelles on ne distinguait que ces mots : votre conduite.. votre conduite… Le prince n’est pas demeuré plus de cinq minutes, au bout desquelles il est allé voir ses filles. On avait prévenu la princesse Anne de la réconciliation, pour qu’elle n’éprouvât aucune surprise trop vive à l’aspect de son père. Elle est d’ailleurs en pleine voie de guérison.