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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 83.djvu/448

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étudians, c’est plutôt comme preuve de l’intérêt universel qu’y excitent les hautes études que comme un des côtes du système d’enseignement. Il est fort douteux que les secours, les bourses, les encouragemens de toute nature, les prix (inconnus dans les universités allemandes), contribuent aux progrès des études ou des sciences, comme nous avons l’air de le croire en France. Ce qui importe, c’est le nombre, la valeur, l’indépendance du personnel enseignant ;[1], le temps qu’il donne aux élèves. Ce qui importe surtout, c’est que l’enseignement puisse, sans retard comme sans secousse, recevoir toutes les modifications devenues nécessaires. L’enseignement supérieur français, enfermé des l’origine dans le moule administratif, est aujourd’hui ce qu’il était il y a cinquante ans : à peine quelques chaires nouvelles ont été créées. En Allemagne au contraire, l’enseignement, libre de toute entrave gouvernementale, par le seul effet de la concurrence des universités, n’a pas cessé ; un seul jour de se transformer, de s’agrandir, de se perfectionner. Depuis cinquante ans, le nombre des cours a au moins doublé. Les facultés de droit et de théologie sont restées à peu près stationnaires, mais les facultés de médecine et de philosophie, plus mêlées au mouvement de l’époque, ont vu leur personnel s’accroître tous les jours. A Berlin, le nombre des professeurs et des privat-docenten des facultés de médecine et de philosophie était de 127 au 1er janvier 1862 ; en 1864, il était de 140, soit 13 professeurs de plus en deux ans, et comme chacun fait en moyenne deux cours, c’est une augmentation de vingt-six cours semestriels. A la vérité, cette étonnante progression s’est arrêtée depuis 1864 à Berlin et dans toutes les universités des états allemands. Est-ce à dire que l’enseignement y soit arrivé à ce point d’être en parfait équilibre avec les besoins du pays ? Nous sommes tenté d’y voir plutôt une conséquence de la grande crise politique que traverse en ce moment l’Allemagne.


II

Cette harmonie constante de l’état de l’enseignement et du progrès des sciences est favorisée dans les amphithéâtres d’Allemagne par l’absence de tout programme. C’est un point fort important. Il n’y a

  1. Malgré la différence de population qui existe entre la France et l’ensemble des états allemands, le nombre des étudians inscrits était, il y a quelques années, exactement le même dans les deux pays. En 1860, l’École normale, nos cinquante-deux facultés, les vingt et une écoles secondaires de médecine et les trois écoles supérieures de pharmacie, Avaient ensemble 19,671 étudians. Les vingt-huit universités allemandes, pendant le semestre d’été 1863, ont distribué l’enseignement à 19,009 étudians. Or, pendant cette même année 1863, le personnel enseignant était, pour ces vingt-huit universités, de 1966 professeurs et privat-docenten, dont chacun faisait en moyenne deux cours, soit un maître par dix élèves, un cours semestriel par cinq élèves.