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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 83.djvu/517

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années à 1 1/2 pour 100. Il ne s’agit donc, si nous voulons en France nous maintenir à la hauteur des pays voisins, que de nous inspirer de ce qui a déjà été fait par eux, en adaptant à nos mœurs et à notre législation les statuts des sociétés de patronage des libérés adultes fondées en Angleterre et en Allemagne. Telle est la conclusion pratique de M. Robin, et nous demandons la permission d’indiquer en terminant les bases de son projet.

Tout d’abord la condition d’un patronage sérieux et efficace, c’est que d’étroites relations soient nouées avec les condamnés dans les prisons. Le patronage de la société ne doit pas, bien entendu, être indistinctement exercé. Il doit s’étendre sur ceux-là seulement qui ont donné des gages sérieux de réformation et de repentir, sans quoi la société ne saurait consciencieusement accorder aux libérés l’appui de sa recommandation. Il serait donc désirable que les membres de la société de patronage fussent admis à visiter librement les détenus. Rien ne peut remplacer les rapports personnels précédemment établis entre les membres de la société et les libérés qu’elle doit patronner. C’est la condition nécessaire d’une sérieuse influence, sans compter tout le secours que des visites faites aux détenus par des personnes du dehors apporteraient aux ministres du culte, souvent écrasés sous le poids de leur tâche. C’est la condition sine qua non d’une bonne société de patronage. M. Robin y insiste et avec raison.

Il est une autre condition non moins essentielle à notre avis, bien que M. Robin ne l’indique pas aussi nettement. C’est la transformation radicale des conditions d’existence que les pratiques de la surveillance administrative créent aux libérés. L’objet d’une société de patronage est de procurer toujours du travail à ses protégés. Les difficultés qu’elle rencontre pour atteindre ce but s’accroissent, si telle ou telle résidence est arbitrairement fixée au libéré, ou si, l’ouvrage venant à lui manquer dans un endroit, la société ne peut pas librement l’envoyer ailleurs. D’un autre côté, il semble impossible que toute surveillance cesse d’être exercée sur des hommes qui sont après tout l’objet d’une suspicion légitime. En présence de ce double embarras, on pourrait peut-être s’arrêter à la loi qui vient d’être assez récemment adoptée en Angleterre pour régler la condition des condamnés qui ont obtenu le ticket of leave avant l’expiration de leur peine. Aux termes de cette loi, les condamnés envoyés en liberté provisoire sont toujours maîtres de changer de résidence à la condition de prévenir la police de leur départ et de leur arrivée. Cette obligation, jointe à l’interdiction du séjour de quelques grandes villes, suffirait, croyons-nous, à la sécurité publique. Enfin il est nécessaire que la société de patronage entre en relations avec le plus grand nombre de personnes possible, manufacturiers, chefs d’ateliers, patrons, grands et petits commerçans, afin de pouvoir