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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 83.djvu/944

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tion ponceuse elle-même, elle ne semble pas avoir été précédée, comme on aurait pu le penser, par aucune secousse violente de tremblement de terre, car dans ce cas l’habitation de Therasia eût été certainement renversée, et on n’aurait trouvé debout aucune des murailles. Ce fait est d’autant plus remarquable que le mode de construction des bâtimens nouvellement découverts prouve que le sol de l’île était déjà sujet aux tremblemens de terre ; les pièces de bois interposées dans l’épaisseur des murs n’ont pas d’autre emploi que d’empêcher les effets désastreux des secousses du sol. Cet usage est encore en vigueur, et précisément pour cette cause, dans toutes les îles de l’archipel. S’il y a eu des ébranlemens considérables pendant l’éruption, ils n’ont dû se produire que lorsque les maisons de Therasia étaient déjà remplies par la pierre ponce, et les habitans écrasés sous les ruines de leurs demeures.

Avant l’effondrement, l’île était très boisée, comme on peut le présumer d’après l’abondance des pièces de charpente employées dans les constructions. L’olivier était très répandu, l’orge la céréale la plus commune. Le climat devait donc être peu différent de ce qu’il est aujourd’hui. La vigne n’y était pas, comme elle l’est de nos jours à Santorin, à peu près la seule plante cultivée, et même il n’existe pas de preuves bien certaines que la culture en fût connue. La population était agricole : elle connaissait les céréales, la réduction de l’orge en farine à l’aide de meules, et probablement par suite la fabrication du pain ; elle savait extraire l’huile des olives, se livrait à l’élevage du bétail, tissait et confectionnait des étoffes. Pourtant l’abondance des ustensiles de lave, d’obsidienne, de silex, l’absence d’instrumens formés de métaux usuels, montrent qu’on était encore en plein âge de la pierre. Les deux petits anneaux d’or trouvés à Acrotiri sont les seuls objets métalliques de cette époque déterrés jusqu’à présent dans les îles du pourtour de la baie de Santorin, et le mode de fabrication, ainsi que la pureté de l’or qui les forme, prouve qu’alors la métallurgie n’existait réellement pas. Cependant la délicatesse des instrumens de pierre montre déjà une adresse singulière chez les individus qui les façonnaient. Les pierres taillées qui se voient aux angles de la grande construction de Therasia et les blocs de la colonne prismatique voisine indiquent aussi une certaine habileté chez les ouvriers qui ont élevé ce bâtiment, surtout quand on pense à la nature des outils qu’ils employaient ; les vases de terre cuite façonnés au tour comme nos poteries modernes, et si remarquables par la beauté de la forme et de la décoration, attestent une finesse de goût extraordinaire.

La plupart de ces vases n’ont pas été fabriqués sur le sol où ils ont été retrouvés ; ils ont été apportés du dehors, car à Santorin pas