Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 84.djvu/611

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus brillans, les étoffes et les tapisseries, les meubles et les glaces, les émaux et les faïences, les sculptures sur bois, sur marbre, sur pierre. On n’avait pas oublié les buffets-restaurans, qui furent un des succès les plus imprévus de l’exposition universelle de 1867. Enfin, à droite de la porte d’entrée, était dressé sur un plan nouveau un escalier provisoire, d’un aspect assez grandiose, conduisant au premier étage, où figuraient, rangés en bon ordre, les dessins des écoles de France. Ces dessins tenaient toute la galerie intérieure du premier étage du palais, c’est-à-dire cette ceinture étroite, mais de longueur démesurée, qui enserre la nef. D’autres salles étaient réservées à une exhibition de gravures anciennes et à un musée oriental.

Avant de passer en revue les richesses enfermées entre les quatre murs de ce palais, il est un défaut ou plutôt un vice assez général que nous voulons signaler dans les tendances de notre industrie d’art. Ce vice porte non sur la forme, mais sur le fond. La forme semble s’améliorer, c’est quelque chose ; pour quelques-uns, c’est tout. Sans avoir pour elle le même respect que Brid’oison, nous croyons qu’il faut l’allier avec le fond, l’harmoniser avec la matière. Telle forme convient à telle matière et ne convient point à telle autre. Les artisans-artistes des bonnes époques ne se méprenaient pas sur ce point. Pour nombre de leurs œuvres, on pourrait assurer, à voir certaines formes, à quelle matière elles appartenaient. C’est une question dont on se préoccupe trop peu aujourd’hui.

Ce serait le rôle naturel de l’Union centrale de réagir à cet égard contre le mauvais goût d’un public peu éclairé qui dicte ses lois, — car il faut vendre, — à la plupart des industries d’art. Elle ne peut le faire que par le progrès lent des notions qu’elle est appelée à répandre. Les industries où l’art a quelque chose à voir se jettent tête baissée dans la recherche de l’apparence, dans le trompe-l’œil, certaines d’avoir pour client tout un public hors d’état encore de se donner la jouissance de la réalité, et qui se paie, faute de mieux, de l’ombre et du semblant des belles choses. Sans doute la vérité reprend ses droits à mesure que le goût général se forme et que les bourses sont mieux garnies. Ne voyons-nous pas les meubles en bois plein empruntés à nos régions prendre peu à peu la place de ces minces placages de bois exotiques appliqués sur des charpentes d’autres bois mal ajustés ? Ne voyons-nous pas le fer forgé reprendre faveur à côté de la fonte ? C’est pour l’avenir un assez bon présage ; mais pour l’instant, en ce qui concerne les objets usuels, chacun tient à se montrer moins pauvre qu’il n’est, et semble demande grâce pour son peu de faste. Chacun répudie sa condition et s’ingénie à se tailler un vêtement au-dessus de ses ressources. Les