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on ne remplaçait pas), indépendamment du lavage des linges à l’eau phéniquée ou chlorurée, on s’empressait d’assainir la surface des murs par un dégagement de gaz acide hypoazotique que l’on obtenait instantanément en versant dans de grandes terrines de l’acide nitrique ordinaire sur des tournures de cuivre. Le métal aussitôt attaqué par l’acide donnait lieu à la production d’abondantes vapeurs rutilantes qui, pénétrant partout, dans les recoins et dans les moindres fissures, ne pouvaient manquer de faire périr les microphytes et microzoaires avec leurs germes. Un remarquable avantage de l’emploi de cet agent chimique réside dans la propriété qu’il a de se régénérer lui-même ; dès que, par sa réaction oxydante, il a perdu une partie de son oxygène, il en emprunte à l’air ambiant et se reconstitue sous sa forme première. Il va sans dire qu’au moment où cette fumigation meurtrière commence il ne doit rester personne dans la salle. Les portes demeurent closes pendant vingt-quatre ou quarante-huit heures, après quoi une active ventilation chasse les gaz délétères et fait rentrer l’air respirable.

Les marins, qui se trouvent comme emprisonnés dans leurs navires pendant les voyages de long cours, sont plus particulièrement exposés aux fatales influences des agens septiques de toute espèce. Les êtres microscopiques qui excitent les fermentations s’accumulent dans la cale avec les produits de leurs réactions multiples, et, lorsqu’au retour d’un voyage on veut faire nettoyer et assainir ces foyers d’infection, de sérieuses difficultés se présentent. Les fumigations de chlore, les lavages avec des solutions d’hypochlorites alcalins, sont à peine d’une efficacité momentanée ; le bois imprégné de matières putrescibles n’est pas désinfecté à si peu de frais. Un seul moyen paraît avoir réussi dans ces derniers temps, c’est le feu.

Depuis longtemps déjà l’amirauté anglaise s’était préoccupée des moyens d’assainir la cale des vaisseaux arrivant des Indes et des autres contrées lointaines. Elle avait constaté les bons effets que l’on obtenait, sous ce rapport, de la torréfaction superficielle des boiseries, et l’on comprend aisément qu’une température qui dépasse 200 degrés doit suffire à la destruction des fermens organisés, en supposant même qu’ils aient pénétré dans les premières couches du tissu ligneux. Le bois d’ailleurs donne lieu, dans ces circonstances, à la production de l’acide acétique goudronneux (acide pyroligneux ou vinaigre brut de bois), un des plus énergiques agens antiseptiques que l’on connaisse. Toutefois le procédé mis en usage pour obtenir ces utiles résultats était incommode et dangereux ; il consistait à faire flamber des copeaux et de menus éclats de bois successivement sur toute la superficie de la cale ; la difficulté, d’activer et