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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 87.djvu/15

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Pompéi est assiégée, fait une défense énergique, est secourue trois fois par Cluentius, général samnite, et obtient de Sylla une capitulation qu’elle ne doit qu’au désir qu’a le général romain de regagner Rome pour y briguer le consulat. Plus tard, devenu dictateur, Sylla se souvint d’une ville qui lui avait si énergiquement résisté : pour mettre un frein à cette humeur hostile, ou pour infuser à ces rebelles du sang romain, il envoya une colonie militaire, trois cohortes, c’est-à-dire près de deux mille vétérans, pour lesquels il fallut se dépouiller d’un tiers des propriétés. Ce partage n’eut pas lieu sans protestations, sans une résistance acharnée, dont Cicéron nous a conservé le souvenir.

Quelques années plus tard, les Pompéiens sont-ils devenus plus dociles ? Non, car le neveu de Sylla qui a conduit la colonie, P. Cornélius Sylla, est accusé d’avoir conspiré avec Catilina et d’avoir voulu diriger les Pompéiens contre Rome, tandis que les complices de Catilina essayaient d’entraîner les autres provinces. Cornélius Sylla fut défendu par Cicéron, qui avait une maison de campagne[1], non pas à Pompéi, mais sur son territoire. Plus tard, pour assouplir encore l’esprit des Pompéiens, Auguste leur envoya une nouvelle colonie qui fut établie dans un faubourg, peut-être sur des terrains cédés ou rachetés par la commune. Les murs, devenus alors inutiles, furent en partie abattus, et les portes de la ville tombèrent pour avoir des communications journalières avec le Pagus Augusto-Felix.

Enfin le caractère national, persistant, rebelle, facilement agressif, inflammable comme les têtes ardentes du midi, éclate encore sous l’empire et malgré le joug terrible des césars. L’an 59 de notre ère, un certain Livinéius Régulus, rayé du sénat, réfugié en Campanie, donna un combat de gladiateurs dans l’amphithéâtre de Pompéi. L’affluence fut grande, on accourut des villes voisines ; mais une rixe s’éleva entre les Pompéiens et les habitans de Nucéria. Des injures on passa aux pierres, des pierres aux coups, des coups aux armes, et bientôt la populace se livra une bataille en règle dans l’amphithéâtre et dans les environs. Les étrangers, moins nombreux, mal armés, eurent le dessous et prirent la fuite. Les parens des morts allèrent se plaindre à Rome ; les blessés s’y firent transporter en litière et demandèrent justice à Néron, qui renvoya la cause au sénat. Le sénat décida que Pompéi serait privée de combats de gladiateurs pendant dix ans, c’est-à-dire de l’an 59 à l’an 69.

  1. Il y composa le traité sur les Devoirs (de Officiis), il y reçut Octave revenant de Grèce pour recueillir la succession de César.