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il avait été évidemment écrasé par la chute du portique sous lequel il avait cherché un abri. Une visière de bronze était voisine, comme si le malheureux avait voulu protéger ainsi ses yeux contre la grêle de pierres ponces. Il semble qu’un autre Pompéien ait été écrasé par la chute de la statue équestre de Néron[1], qui était sur l’arc de triomphe de la rue de Minerve ; son squelette a été trouvé à côté de cette statue, qui est en bronze, un peu plus grande que nature et fort laide. Dans l’intérieur de la célèbre maison du Faune, on a réuni les ossemens d’une femme sans pouvoir jamais découvrir son crâne, broyé sans doute sous les débris d’un étage écroulé, et plus facilement décomposé par l’humidité du sol. M. Fiorelli, en 1861, a constaté[2] la chute du premier étage d’une maison où les ossemens de deux personnes étaient brisés et dispersés parmi les débris. Du 18 au 23 janvier, en déblayant l’atrium, il découvrit encore le cadavre d’une femme atteinte sur le seuil du tablinum, au moment où elle fuyait avec ses objets les plus précieux. Ses bijoux étaient renfermés dans une cassette de bois revêtue d’incrustations : un collier composé d’amulettes de toute sorte, des épingles à cheveux en os, un fuseau, quatre flacons à parfums en verre. Une lampe de terre cuite, portant l’image d’un dauphin, était auprès d’elle et l’avait éclairée dans sa fuite. L’écroulement des parties supérieures du portique ou de la maison la fit périr.

Enfin, dans les derniers mois de l’année 1869, on déblayait une maison située au-delà de la rue de Stabies, et où le nom de l’esclave Thrason est tracé sur le stuc plusieurs fois, en grec, avec la pointe d’un couteau. Au fond du petit jardin de cette maison, au premier étage du gynécée, on a découvert onze cadavres, qu’on a essayé en vain de mouler ; les débris des constructions et les racines d’arbres mêlées aux ossemens ont morcelé et fait tomber le plâtre versé dans cette immense cavité. On a recueilli des boucles d’oreilles, quelques bijoux, une longue chaîne d’or qui ressemble pour la façon aux chaînes étrusques, sept cents monnaies d’or et d’argent. Les habitans de la maison s’étaient tous réfugiés, avec ce qu’ils avaient de plus précieux, dans cet appartement élevé ; ils s’y croyaient à l’abri des matières volcaniques qui remplissaient peu à peu le rez-de-chaussée ; ils attendaient la fin de cette terrible épreuve. Une oscillation plus violente du sol a probablement fait écrouler le haut de la maison et la toiture ; ils ont été écrasés.

La seconde cause de mort fut la réclusion forcée ou volontaire. J’appelle réclusion forcée celle des vieillards infirmes par exemple ou des malades abandonnés dans leur lit, celle des prisonniers ou

  1. Pompeianarum antiquilatum historia, t. II, p. 86.
  2. Giornale degli Scavi, 1861, p. 16 à 19.