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chitecte Bellicard, de Lalande, de Requier, de Romanelli, du marquis Venuti, et même celles de Winckelmann, sont pleines d’incertitudes ou de contradictions. On prétendait, pour mesurer la grandeur de la ville, avoir compté cinq cents pas depuis la mer jusqu’à la porte du Vésuve, et quinze cents pas sur le rivage entre Résina et Portici. On avait reconnu une vallée au-delà du théâtre, une grande rue décorée de portiques qui reliait le théâtre à la ville, une basilique, un forum, des temples, une voie extérieure bordée de tombeaux ; mais la manière dont les fouilles étaient conduites nous est un témoignage d’abord que les études topographiques, s’il en a été fait, étaient fort incomplètes, ensuite qu’il reste encore bien des richesses enfouies à côté desquelles on a passé, enfin qu’un seul quartier de la ville, deux tout au plus, ont été explorés.

La moisson sera donc encore belle lorsque des explorations régulières, à ciel ouvert, pourront être entreprises. On a commencé en 1828, sous le règne de François Ier, à 200 pas au sud-ouest du théâtre. De ce côté, qui jadis était voisin de la mer, et à l’extrémité de la ville, on n’a rencontré que 11 mètres de cendres ; l’on a déblayé une rue qui conduisait du théâtre au port, les maisons qui bordaient cette rue, et notamment la maison d’Argus, où le premier étage était conservé avec ses charpentes consumées et noircies par le temps, avec ses vingt et une chambres, éclairées chacune par une fenêtre[1], avec des provisions de comestibles, noisettes, noix, dattes, amandes, figues, froment, lentilles, fèves, riz, miel dans un vase de verre, sans oublier les bijoux, le linge, les ustensiles, etc. On n’a pas su consolider l’étage supérieur, comme on le ferait aujourd’hui, et il a été démoli pour prévenir un éboulement ; mais il n’en est pas moins acquis qu’en s’avançant vers l’intérieur du tumulus et en soutenant les étages supérieurs avant de déblayer les étages inférieurs, on peut faire reparaître dans leur intégrité les demeures des anciens habitans d’Herculanum. Quant aux richesses d’art qu’elles contiennent, on peut les calculer d’après le nombre d’objets précieux recueillis dans une seule villa.

Ce fut de 1750 à 1760 que le roi Charles III, averti par un particulier qui creusait un puits, fit dépouiller et combler de nouveau cette maison de campagne, dont Winckelmann a décrit une partie[2]. On y a trouvé de beaux candélabres, des vases et des meubles en bronze, un lit et un double siège (bisellium), une bibliothèque dont le bois était pourri, mais dont les manuscrits, réduits en pâte par l’eau et rongés aux extrémités, se déroulent sur la machine in-

  1. Voyez Bechi, t. VIII du Museo Borbonico, et Finati, Manuel pour Herculanum, Pompéi et Stabies, Naples 1844.
  2. Découvertes d’Herculanum, 4e partie, p. 38.