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LE RÉGIME MUNICIPAL DES VILLES.

les électeurs provinciaux et politiques. Il faut être domicilié au moins depuis le 1er janvier de l’année de l’élection, être Belge, majeur, et payer un impôt supérieur à 42 francs. Ces électeurs nomment le conseil municipal, qui se compose de 7 membres au moins et de 31 au plus, âgés d’au moins vingt-cinq ans, et élus pour six ans avec renouvellement annuel par tiers. C’est le roi qui choisit dans le sein du conseil le bourgmestre et quatre échevins. Le bourgmestre, les échevins et les conseillers composent le corps communal.

On sait que les octrois ont été supprimés en Belgique par la loi du 18 juin 1860, mais ils ont été remplacés par une part accordée aux villes sur le produit d’autres impôts indirects, 75 pour 100 des droits d’entrée sur les cafés, 34 pour 100 des droits d’accise sur les vins, eaux-de-vie, vinaigres et sucres ; c’est un peu comme si, dans ce petit pays, le guichet du receveur avait été reculé, de cent pas et reporté de la barrière à la frontière. Toutefois cette réforme, qui a augmenté les ressources des villes qui n’avaient pas d’octroi, a eu pour effet d’arrêter, de fixer à une sorte de limite permanente les recettes des villes à octroi, notamment les recettes de Bruxelles. De là un véritable embarras et l’obligation d’emprunter pour les travaux de la Senne et pour les constructions et améliorations nouvelles, qui font de Bruxelles une ville si justement admirée. Dans le budget de 1869, où les recettes et les dépenses ordinaires ne figurent que pour 6,500,000 francs environ, les recettes et les dépenses extraordinaires se balancent par plus de 9 millions ; elles n’atteignaient pas 2 millions en 1857.

Je pourrais passer de Bruxelles à La Haye, si bien administrée, comme presque toutes les villes de la Hollande, revenir vers les régions du midi, retrouver à Rome, à Florence, à Madrid, d’assez beaux restes des antiques et libres institutions municipales qui ont tenu une si grande place dans l’histoire de l’Italie et de l’Espagne, ou bien m’arrêter à étudier à Saint-Pétersbourg et à Constantinople les commencemens et en quelque sorte les premiers pas d’une vie municipale naissante[1], réunir ainsi par un contraste facile le dé-

  1. A en croire les dépêches officielles, la loi turque sur l’organisation des vilayets (départemens), faite pour tenir l’une des promesses du hatt-humayoum de 1856, assurerait l’élection des conseils communaux au suffrage universel, sans candidature officielle, sans privilège pour les musulmans. En fait, l’électeur doit payer 50 piastres de contributions directes, l’éligible 100 piastres. Une liste triple d’éligibles, formée par les fonctionnaires, est envoyée à chaque commune du caza ; les anciens la réduisent au double, et la renvoient à un fonctionnaire supérieur, mutessarif, qui choisit les élus, et dans les conseils ainsi élus le vali, gouverneur-général, ou ses délégués ont voix délibératives. Dans le conseil central du vilayet, il y a sans doute doux chrétiens et deux musulmans, mais flanqués de cinq fonctionnaires musulmans. Cela s’appelle la liberté des élections, l’égalité des cultes, l’indépendance municipale.