produit des impôts d’Amsterdam. Les exigences militaires de la France et les frais imprévus résultant de l’introduction du gouvernement royal avaient creusé ce nouveau déficit. Napoléon revenait toujours à la charge dans ses lettres pour que Louis réduisît les rentes. Le roi disait avec raison que la réduction d’une rente d’état sous le nom de retenue ou d’impôt n’est pas autre chose qu’une banqueroute déguisée, que la Hollande vivait encore de son crédit, mais ne vivait plus que de cela, que si elle manquait à ses engagemens, tout croulerait. « Une banqueroute, disait-il, équivaudrait à la rupture de nos digues. » L’empereur, qui avait ses projets, ne voyait pas qu’il y eût nécessité absolue de conserver même les digues. Ce qu’il apprit avec plus de plaisir, c’est que son frère avait obtenu de leurs hautes puissances du corps législatif qu’elles renonçassent à un titre peu conforme aux très modestes attributions d’une assemblée qui n’avait que ce nom de commun avec les anciens staaten-generaal. « Comment ! s’écria l’empereur à cette nouvelle, Louis est parvenu à arracher cette plume du paon ! » Il y avait dans cette ombre de pouvoir parlementaire quelque chose qui offusquait ses sentimens d’autocrate. Cependant le roi avait visité au printemps les îles de la Meuse et la Nord-Hollande. Il avait été généralement bien accueilli par les populations. La division du pays en départemens correspondant aux anciennes provinces avait été régularisée. Le seul changement notable fut la séparation de l’ancienne province de Hollande en deux départemens ; Nord-Hollande et Sud-Hollande, séparation qui mettait fin à la prépondérance écrasante de cette province, et que tout concourait à justifier, car cette division a été réintroduite il y a une vingtaine d’années. Tout à coup un grand malheur privé vint assombrir cette aurore du règne. A peine de retour à La Haye, le roi vit mourir inopinément le 2 mai son fils aîné. Ce fut un coup affreux pour Louis et pour Hortense, qui s’abandonnèrent à tous les excès de la douleur. Le séjour de La Haye, de la Hollande elle-même, leur devint insupportable. Après quelque temps passé à la campagne chez M. de Heeckeren, la reine se rendit aux Pyrénées, où le roi la rejoignit bientôt. Louis, dans ses mémoires, sent que cette fugue n’avait rien de très royal, et met en avant pour l’expliquer l’état de sa santé et le chagrin cuisant qu’il éprouvait de voir et d’être impuissant à soulager les intolérables souffrances du pays sur lequel il était appelé à régner.
Les événemens se précipitaient à l’autre extrémité de l’Europe. La bataille de Friedland avait été gagnée par l’armée française, l’entrevue de Tilsitt avait eu lieu, et tout le système européen semblait désormais dépendre de l’amitié personnelle des empereurs de France-et de Russie, qui n’avaient plus rien à se refuser. Le résultat le plus