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demeureraient inconnus. Ces causes pourtant, et c’est là ce qui doit encourager les explorateurs, ne sauraient être très nombreuses, du moins si l’on écarte celles qui sont fabuleuses ou tout à fait invraisemblables ; nous rangeons dans cette dernière catégorie une hypothèse souvent invoquée, celle de l’influence persistante du noyau central en fusion, influence supposée assez forte pour supprimer d’abord, pour atténuer ensuite les effets de la latitude. Les impossibilités de toute sorte attachées à cette opinion auraient dû la faire abandonner depuis longtemps ; aussi les meilleurs géologues n’apportent-ils aucune preuve à l’appui, ou la mentionnent sans y insister, comme s’ils en comprenaient le peu de solidité. M. d’Archiac, dans le résumé général qui termine son livre intitulé Géologie et paléontologie[1], se contente d’affirmer que la vie organique n’a plus dépendu que de l’action solaire, à partir du moment où la température de l’atmosphère, cessant de participer à celle de la terre, a perdu graduellement son uniformité première. C’est énoncer un principe des plus vagues en ayant soin d’en esquiver les conséquences. M. d’Omalius d’Halloy[2] dit bien, il est vrai, que la chaleur centrale exerçait ; encore une grande influence sur le climat pendant l’époque tertiaire, mais il ne donne pas les raisons de cette croyance. M. Schimper a tout récemment[3] avoué que la science ne pouvait fournir à cet égard aucune réponse satisfaisante. Enfin M. Burmeister, dans son histoire de la création, fait voir que l’interposition d’une écorce solide a dû opposer depuis longtemps, peut-être même dès l’origine des êtres vivans, un obstacle infranchissable à l’action du foyer interne sur la température de la surface ; mais en revanche il croit à l’influence réchauffante des matières en fusion rejetées au dehors. Les porphyres, les basaltes et les laves successivement épanchés à la surface auraient, en exhalant leur calorique et en se solidifiant peu à peu, contribué à maintenir l’élévation de la température, et en auraient rendu plus tard l’abaissement moins rapide. Il suffit d’énoncer un pareil système pour reconnaître qu’il ne repose sur aucune base sérieuse. Les volcans sous nos yeux n’ont-ils pas, comme d’autres montagnes, leurs neiges éternelles ? A-t-on jamais pensé que les éruptions du mont Hékla aient servi à adoucir le climat de l’Islande ? Si de pareils effets s’étaient produits dans les temps antérieurs, à quelles étroites limites ne faudrait-il pas les ramener pour rester dans le vrai ? Dans tous les cas, ils seraient loin de pouvoir rendre compte des phénomènes grandioses dont nous avons exposé les phases. La difficulté n’est pas d’admettre que

  1. Paris, 1866, p. 760.
  2. Précis élémentaire de géologie, 2e édit., Paris et Bruxelles, 1868, p. 279.
  3. Traité de paléontologie végétale, I, p. 09.