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des granges conviennent surtout pour être ajoutées à la drêche, aux pulpes, aux cossettes de betteraves traitées par le procédé Champonnois, aux résidus des distilleries de grains et aux marcs de pomme et de raisin, que l’on ne cherche pas assez à utiliser. Un simple mélange suffit pour composer une bonne nourriture : dans leur état naturel, les petites graines traversent le tube digestif sans produire d’effet nutritif ; mais elles sont digérées quand elles sont administrées après avoir été pendant quelque temps en contact avec des corps humides.

Il y a plus d’un quart de siècle qu’un industriel de Lyon employait la mélasse répandue sur des fourrages pour nourrir ses chevaux. Les cultivateurs du nord s’en servent aujourd’hui avec avantage pour engraisser les bestiaux et nourrir les vaches laitières. On arrose avec de l’eau mélassée, à la dose de 1 kilogramme mélasse pour 100 litres d’eau, un mélange de paille hachée et de légumineuses : vesce, gesse, lentillon. On emploie à cet effet des caisses dans lesquelles on tasse les matières sèches, et on les dispose de manière qu’on puisse recueillir le liquide qui s’écoule après avoir traversé la masse solide. On le rejette sur le tas. On peut faire consommer ainsi même les pailles les plus dures ; elles sont ramollies et contractent un goût qui plaît aux animaux habitués à cette nourriture.

Nous avons dit que le cultivateur doit prévoir les besoins de la mauvaise saison et ensemencer le plus possible en vue du printemps prochain. Celui qui peut disposer d’une grande quantité de résidus de fabrique, ou qui se trouve avoir plus de nourriture verte qu’il ne peut en faire consommer, doit chercher à s’approvisionner pour l’hiver. Les produits qui ne peuvent pas être desséchés sont économiquement conservés dans des fosses ou dans des silos. Nous avons décrit le procédé employé depuis un temps immémorial dans le Lyonnais ; les nourrisseurs de Paris l’ont adopté pour conserver la drêche. Ils établissent à côté de la vacherie une fosse et la disposent, ainsi que le local où elle se trouve, de manière qu’on peut faire reculer la voiture chargée jusque sur le bord de la fosse ; à chaque décharge, on tasse la drêche, la fosse est ainsi remplie régulièrement. C’est aussi dans des fosses que l’on conserve la pulpe de la betterave et les feuilles de cette plante, que l’on faisait autrefois consommer sur place au moment de la récolte. Les feuilles étaient perdues en grande partie à cause de la quantité qui était mise à la fois à la disposition des animaux. D’après une communication récemment faite à la Société centrale d’agriculture, ce moyen de conservation se généralise dans le nord de la France. On fait d’ordinaire des fosses de 7 mètres de longueur sur 3 mètres de largeur et 4 mètres de profondeur, construites à angles arrondis et abritées