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tique la révolution du 4 septembre ; nous en dirons seulement, avec la plus complète impartialité, les conséquences militaires au point de vue de la défense nationale en province. Cet acte fut le résultat d’un violent accès de mépris et d’indignation. Quelle fut l’influence de cette transformation du pouvoir central sur l’organisation de nos forces et sur la conduite de la campagne ? Le gouvernement, présumé vacant, fut remis aux mains des députés de Paris sans exception. C’est là le trait caractéristique et fatal de cette révolution, qui excita autant d’enthousiasme à Paris que de consternation dans les départemens. La composition du gouvernement provisoire éveillait ici les plus tristes appréhensions. La province, à tort sans doute, se crut d’abord négligée ; on ne lui demandait pas son avis, et le gouvernement s’enfermait dans Paris, sauf deux membres qui ne pouvaient en être regardés comme les personnalités les plus importantes. Elle ne récrimina pas cependant, elle ne ménagea point les sacrifices ; mais on s’occupa trop tard d’y organiser un mouvement national, et l’on y employa des hommes et des moyens insuffisans. Au début, rien n’était disposé dans les départemens pour le rôle qu’ils devaient jouer dans l’œuvre de salut. Toutes les troupes formées et en état de servir, toutes les gardes mobiles déjà organisées, avaient été convoquées dans la capitale. Bien plus, l’on n’avait seulement pas songé à pourvoir la province d’un général et d’un ministre de la guerre. Paris gardait dans ses murs trois généraux bien connus, ayant tous trois déjà exercé des commandemens en chef, Trochu, Vinoy, Ducrot. Paris avait en outre le général Le Flô, puis un certain nombre de divisionnaires. La province par contre, après avoir formé des armées de 200, 000 hommes, allait les confier à un général du cadre de réserve, à deux brigadiers de promotion récente, à des capitaines de vaisseau ; parfois même des corps de 40, 000 ou de 50, 000 hommes allaient être dirigés par de simples chefs de bataillon. Cette situation, pour nous si accablante, a été néanmoins atténuée par d’heureux hasards ; des noms complètement inconnus ont été bientôt environnés d’une haute réputation militaire. D’Aurelle de Paladines s’est montré un organisateur vigoureux, un chef prudent et énergique. Quant à Faidherbe et à Chanzy, confondus dans la foule il y a quelques mois, ils ont dès maintenant conquis leur place parmi les généraux les plus estimés d’Europe.

Le jour où le gouvernement du 4 septembre délégua tous ses pouvoirs à M. Crémieux, il donna la mesure de son erreur sur la province. Certes il fallait une bien grande faculté d’illusion pour confier à cet orateur disert le soin d’organiser toutes les forces militaires de la France. M. Crémieux, il est vrai, a fourni la preuve qu’il ne manquait pas d’activité : outre les nombreuses occupa-