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Nous croyons donc, avec la plupart des géologues, qu’il est impossible de saisir une discontinuité quelconque entre les terrains ardens, les fontaines ardentes, les salzes et les suffioni.

Là ne s’arrête pas le lien qui réunit ces phénomènes. Il y a passage graduel des salzes aux sources de pétrole, et il existe une transition insensible entre les suffioni et les émanations volcaniques. Par conséquent, un jour à venir, s’il est établi que les pétroles doivent leur origine à des matières végétales ou animales altérées et modifiées par une action semblable à la fermentation paludéenne, la théorie de Volta se trouvera démontrée et étendue même au-delà des limites que lui assignait le savant physicien. Alors on aura les raisons les plus plausibles pour attribuer une provenance organique non-seulement aux gaz des terrains ardens, des salzes et des suffioni, mais encore à ceux des volcans.

L’importance de cette conclusion n’a pas échappé aux géologues ; aussi, depuis quelques années, beaucoup d’entre eux redoublent-ils d’efforts pour arriver à prouver que les pétroles résultent comme la houille d’une décomposition de substances ayant appartenu à des organismes vivans. S’ils arrivent à établir cette démonstration, ce dont quelques-uns, principalement ceux de l’Amérique du Nord, ne doutent pas, la question de la matière première des gaz volcaniques sera tranchée ; mais il faut bien reconnaître que le problème de l’origine des éruptions ne sera pas entièrement vidé pour cela, il restera encore à décider si la chaleur qui se manifeste si puissamment dans les volcans est l’effet ou la cause des dégagemens de gaz qui s’y produisent. Devra-t-on croire à une action de la chaleur centrale intervenant pour favoriser la décomposition organique souterraine, ou pourra-t-on expliquer tous les faits observés par une fermentation anormale, s’opérant à une grande profondeur, à l’abri de l’influence oxydante de l’air ? Telle est la question que l’on devra résoudre. Un pas important aura été accompli ; mais on se trouvera encore en présence d’un de ces obstacles qui semblent infranchissables au premier abord, et dont le plus souvent la science ne triomphe que péniblement par les incessans labeurs des hommes qui se vouent à son culte.

Fouqué.