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tique du self-govermnent. Si l’on veut assimiler les villes aux hameaux, l’on est conduit à restreindre les franchises urbaines de manière à les rendre presque illusoires ; si l’on conserve aux mains du maire le pouvoir réglementaire dans sa plénitude, on crée dans les communes de petites tyrannies, des dictatures dont l’existence est incompatible avec les principes du gouvernement représentatif. Notre histoire nationale et les précédens de notre législation prouvent que le système anglais pourrait parfaitement prendre racine en France. Il suffirait de rétablir dans ses traits principaux une organisation qui a fonctionné chez nous pendant plusieurs années, et qui n’a été supprimée que par un coup d’état funeste, par une usurpation despotique. Sous l’ancien régime, on distinguait avec raison les agglomérations urbaines, ayant le titre et les droits de commune des simples communautés d’habitans. Les lois de décembre 1789 et de janvier 1790 eurent le tort d’assimiler les unes et les autres, et de les soumettre à des modes d’administration à peu près identiques. La constitution du 5 fructidor an III, qui subsista jusqu’au consulat, remit en honneur les vrais principes, et plaça les localités sous un régime plus naturel à la fois et plus salutaire. C’est vers ce système, logique et bienfaisant, que se reportent aujourd’hui les regards des hommes qui désirent voir se réaliser une décentralisation sérieuse. Le grand mérite de la constitution de l’an III, au point de vue des institutions locales, c’était de donner aux villes et aux campagnes une organisation distincte, à l’exemple de ce qui se pratique chez tous les peuples civilisés. L’on avait fixé au chiffre de 5,000 habitans le point de démarcation entre les agglomérations urbaines et les populations rurales. Au-dessous de 5,000 habitans, les localités étaient confondues dans le canton pour tous les services administratifs. Elles élisaient seulement un agent municipal et un adjoint, qui se réunissaient au chef-lieu du canton avec les agens des autres communes, pour constituer une assemblée chargée de délibérer sur toutes les affaires intéressant le tout ou les parties de la municipalité cantonale. Ainsi l’action administrative restait à la commune ; mais la délibération appartenait au canton, qui constituait la véritable unité, l’arrondissement n’existant plus. Dans les communes ayant une population de 5,000 à 100,000 habitans, il devait y avoir une administration unique, composée d’un nombre de membres qui variait, suivant le chiffre de la population, d’un minimum de 5 à un maximum de 9. Dans les communes au-dessus de 100,000 habitans, il était institué trois administrations municipales de 7 membres chacune, reliées entre elles par un bureau central de 3 membres, lesquels étaient nommés par le gouvernement, tandis que les membres des administrations municipales étaient électifs. Ce système avait sans doute des défauts ;