Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 93.djvu/268

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

attributions seraient plus précises et mieux réparties. Il n’y a pas lieu d’insister pour le moment sur le mécanisme de cette organisation cantonale : ce sont les agglomérations urbaines qui forment l’objet de cette étude.

La loi de 1867 sur les conseils municipaux, malgré d’heureuses réformes de détail, est restée dans la vieille ornière dont il faut à tout prix sortir. Elle a porté à sept années la durée des fonctions de conseiller communal. C’est évidemment excessif. L’opinion presque unanime des meilleurs esprits est que des assemblées issues de l’élection doivent s’y retremper souvent. Sans doute il ne faut pas abuser du suffrage universel et en défendre les ressorts par un trop fréquent usage ; mais il y a une logique pour les institutions comme pour les choses, et l’on ne peut impunément la violer. Les Anglais, avec grand sens, n’assignent qu’une durée de trois ans au mandat de conseiller municipal : le mandat de membre du parlement a cours pendant un temps beaucoup plus long. Nos voisins ont pensé qu’il y avait lieu dans les affaires d’intérêt local à une intervention plus fréquente des électeurs. Il y avait encore une autre raison. De l’autre côté de la Manche, on admet sagement que le pouvoir central a le droit de dissoudre le parlement ; on ne reconnaît au contraire à aucune autorité le pouvoir de suspendre, de dissoudre ou de remplacer les assemblées locales. Elles doivent toujours atteindre le terme légal de leur vie : elles ne sont pas exposées à une mort subite ou violente. S’il en était autrement, il n’y aurait plus d’autonomie pour les localités. En effet, qui aurait le droit de suspendre ou de dissoudre un conseil municipal ? Ce n’est point le maire, car il a la même origine, il exprime les mêmes influences et le même esprit, et ce serait une extension déraisonnable des attributions de ce magistrat, qui n’est en Angleterre que le président annuel du conseil municipal. Ce n’est pas non plus l’autorité centrale ou l’un de ses agens, car dès lors les localités ne seraient plus indépendantes dans la sphère légale de leurs attributions ; elles seraient les vassales des fonctionnaires gouvernementaux. Les Anglais ont évité tous ces écueils. Les conseils des villes ne peuvent en aucun cas être suspendus ou dissous ; mais les conseillers ne sont élus que pour trois ans, et ils sortent chaque année par tiers. Ce renouvellement partiel et annuel est une des pièces fondamentales du système : le conseil ne peut s’isoler de la population et s’abandonnera l’esprit de coterie ; toutes les résolutions graves sont inspirées ou critiquées à temps par le vote des électeurs. C’est à de pareilles conditions qu’une assemblée locale peut être indépendante de l’autorité centrale. Une des questions les plus importantes que soulève tout projet de réforme des institutions locales, c’est la question de l’électorat et de l’éligibilité. Nous avons en France le suffrage universel, et le prin-