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la végétation commence à paraître et les oiseaux à chanter dans les taillis. Beaucoup de plantes ont des boutons déjà très développés en automne, de sorte qu’on voit des fleurs avant la fin de l’hiver. Souvent les touffes de fleurs jaunes des jasmins[1] semblent s’échapper de la neige, et presque aussitôt une petite spirée[2] qui fait songer aux pâquerettes, les daphnés lilas, les forsythias jaunes se montrent dans la campagne, où l’arbre de Judée est aussi dans ses jours de fête. Les pêchers, couverts de masses de fleurs aussi grandes que des roses, sont comptés par les admirateurs de la nature au nombre des choses les plus gracieuses et les plus gaies du monde. À cette époque fleurissent également les camellias, mais sous ce climat, déjà un peu froid en hiver, on est obligé de donner des abris à ces charmans arbustes. Quand vient le mois de mai, ce sont des viornes portant une multitude de têtes blanches comme la neige, une spirée[3] plus belle que l’espèce du même genre qu’on appelle en France la reine des prés, des primevères[4], les charmantes plantes, la dervillia rose et la dielytra, introduites dans les jardins d’Europe depuis que la Chine a été explorée sous le rapport scientifique, les glycines et des rosacées, dont les espèces ont été observées plus anciennement au Japon[5].


II.

Les explorations effectuées depuis vingt-cinq ans, et de nombreuses récoltes de plantes et d’animaux, avaient fait connaître l’état de la nature sur toute la bande orientale de la Chine. Les recherches récentes poursuivies avec un soin extrême dans le nord du céleste empire ne laissaient plus rien ignorer d’essentiel sur une contrée qui, sous divers rapports, offre un intérêt considérable ; mais sur la carte on voyait encore une immense étendue de territoire qui n’avait été foulée par aucun observateur. Les provinces centrales et occidentales de la Chine restaient pour les naturalistes une région à peu près inconnue. Seuls, quelques animaux originaires de cette partie du monde, et obtenus soit par des missionnaires, soit par le consul de France à Han-keou, M. Dabry, indiquaient l’existence d’un champ d’étude où l’observateur ferait certainement d’importantes découvertes.

L’abbé Armand David avait le plus grand désir d’explorer le

  1. Jasminum nudiflorum.
  2. Spirœa prunifolia.
  3. Spirœa Reevesiana.
  4. Primula cortusoides.
  5. Kerria japonica.