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de nouvelles surprises, d’être prêt à tout événement. A nos portes est un ennemi qui, par ses exigences et sa dureté, peut un jour provoquer de nouveaux conflits, et dès lors la France doit veiller, se donner une force formidable pour empêcher la violation de son territoire et au besoin pour être en mesure de profiter des circonstances.

Si le développement de la puissance allemande nous oblige d’augmenter notre état militaire, nos intérêts, moins menacés sur mer, nous permettent d’entamer plus profondément les allocations de la marine. Il ne nous paraît pas impossible de désarmer une partie de nos bâtimens, de renvoyer dans leurs foyers la moitié des équipages, et de réduire, soit par la délivrance de congés, soit par la mise en disponibilité ou dans le cadre de réserve, l’effectif des officiers de la marine, du génie maritime, du commissariat, des aumôniers, mécaniciens, commis aux vivres et magasiniers. Par cette mesure, on réaliserait une économie de 24 millions sur la dépense des états-majors et des équipages à terre et à la mer, ainsi que sur celle des vivres et des hôpitaux. On trouverait peut-être encore 1 million sur les corps et agens divers, inspecteurs des services administratifs, personnel des directions de travaux, des manutentions, des ponts et chaussées, etc.

Le plan militaire du général Faidherbe supprime entièrement les troupes de la marine, et laisse aux colonies le soin d’entretenir les corps chargés de leur défense et de leur protection. L’adoption de ce système équivaudrait à une économie de 11 millions; mais il semble difficile d’adopter une pareille mesure. Toutes nos colonies n’ont pas la richesse suffisante pour accepter la charge qu’on leur imposerait, et il faudrait le plus souvent subvenir sur les fonds du trésor à l’impuissance des caisses coloniales, ce qui restreindrait singulièrement les prévisions d’économie. Il existe, il est vrai, une opinion hardie qui ne s’arrêterait pas à cette difficulté, et qui la trancherait par l’abandon de toutes les colonies improductives. Cette opinion ne saurait être accueillie sans discussion. Au-dessus de la question de finances se place la question politique, l’intérêt de notre influence dans les contrées lointaines. Il y a aussi une question de générosité vis-à-vis de populations liées à la métropole depuis de longues années. Tant qu’une résolution n’aura pas été prise sur ces différens points, nous ne croyons pas possible d’adopter la suppression de l’infanterie et de l’artillerie de marine. Jusqu’à ce moment, la dépense qui en résulte continuera de figurer dans le budget de l’état.

Aux diminutions sur le personnel de la marine doivent nécessairement correspondre des diminutions analogues sur les dépenses du matériel. Il conviendrait, non pas d’arrêter complètement,