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qu’un fût extrêmement court ne les rende peu propres à donner du bois d’œuvre. Il n’y a pas à se préoccuper de la perte que le couvert des chênes réservés peut occasionner dans la production du sous-bois ; la valeur du bois d’œuvre de chêne est souvent plus du quintuple de celle des bois de feu. Quant à la reproduction du taillis même, ou plus exactement quant à la perpétuité de la forêt ainsi traitée en taillis sous futaie, elle est parfaitement assurée par une réserve très nombreuse, à une condition cependant, mais à une seule : c’est que la révolution du taillis soit assez longue pour que les arbres de réserve aient un fût allongé et des cimes élevées, ce qui suffit pour atténuer l’influence nuisible de leur couvert. Dans ce cas, les semis ne font pas défaut lors des exploitations, et ils contribuent d’une manière heureuse à perpétuer le sous-bois et la réserve. On peut même ajouter que, plus grand est le nombre des arbres de réserve, plus les rejets de souches sont rares et malingres dans le sous-bois, plus facilement par suite les brins de semence se maintiennent sur les points découverts par l’exploitation des vieux arbres.

La rareté des baliveaux dans nos taillis est due, on peut donc l’affirmer, à la rareté des arbres de réserve ; l’une et l’autre ne datent que du commencement de ce siècle. Le remède à ce mal, ainsi que la meilleure précaution à prendre contre la disette de bois d’œuvre, est de conserver précieusement les chênes qui se trouvent encore dans nos taillis. Cette réserve, même admise en principe, rencontre des obstacles fréquens dans le besoin des propriétaires, de plus elle présente dans l’exécution des difficultés réelles. Les gardes que l’on emploie pour marquer les arbres sont en général trop disposés à livrer à l’exploitation tout arbre voisin d’un autre déjà marqué, bien que les cimes ne se touchent pas ; ils laisseraient tomber de même tous les plus gros arbres par la seule raison qu’ils sont plus gros que les autres ; enfin, fatigués et sans cesse détournés des cimes vers les pieds par leur besogne, ils éprouvent bientôt la plus grande difficulté à bien voir les arbres auprès desquels ils passent. D’autre part, le balivage terminé, lorsque l’agent qui dirige cette opération a entendu répéter pendant trois, quatre heures, ou plus encore, l’appel monotone des arbres conservés, dont les gardes disent pour chacun l’essence et la classe, il croit être certain que la réserve est nombreuse. Cependant elle l’est souvent moins qu’elle n’aurait pu l’être, parce que beaucoup d’arbres bien venans ont été abandonnés par inadvertance. C’est là un reproche à faire au régime du taillis sous futaie ; il est difficile d’y éviter les omissions.

La réserve peut d’ailleurs être nombreuse, mais mal composée ; c’est ce qui arrive toutes les fois qu’elle porte principalement sur de tout jeunes baliveaux, de l’âge du taillis, en négligeant des