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plus de 2 millions d’hectares de forêts. Perpétuelle comme l’état, dont elle est l’élément organique, la commune trouve dans les forêts une propriété d’un excellent rapport. Quelles sont en effet les communes possédant des revenus réels et durables en dehors de l’impôt, sinon les communes propriétaires de forêts ? Quelles sont parmi celles-ci les communes riches, sinon, sauf quelques exceptions, celles qui sont restées propriétaires de futaies ? La comparaison des communes de l’ouest, privées de propriétés forestières, avec celles de l’est, qui en sont pourvues, des communes de la plaine possédant des taillis avec celles de la montagne propriétaires de futaies, suffit à l’établir. La plupart des communes situées dans les vallées des Vosges ou sur les plateaux du Jura possèdent des forêts d’une étendue souvent assez faible, mais constituées en futaie. Le revenu dépasse ordinairement 50 francs par hectare, et les villages qui jouissent de 10,000 francs de rente fournis par leurs futaies sont communs dans ces montagnes. Les routes et les fontaines s’y distinguent par leur beauté ; les bâtimens publics sont nombreux, bien entretenus, souvent même construits avec luxe ; dans le département des Vosges, ce sont surtout des maisons d’école, dans celui du Doubs des églises monumentales. L’arrondissement de Pontarlier, dont le chef-lieu a 5,000 habitans, possède 13,000 hectares de forêts communales, qui donnent un revenu annuel de 1 million de francs. Ces faits éloquens, il est facile de les expliquer. La commune n’a ni activité propre, ni esprit de suite dans son administration, ni économie dans la gestion de ses affaires. Les propriétés qui lui conviennent sont surtout des biens naturels, produisant sans l’intervention de l’homme et donnant des produits constans et toujours recherchés : des eaux, des carrières, des pâturages, des bois. Si en outre la production s’améliore d’elle-même et gagne en valeur avec le temps, ainsi que cela se voit pour les forêts, ces biens constitueront pour les communes une source merveilleuse de revenus. La forêt est tout à la fois l’agent naturel et l’instrument de la production. Qu’on s’abstienne d’y toucher, qu’on la défende, qu’on la garde seulement (à cette tâche, un homme suffit souvent pour 500 hectares), le sol s’améliore, les bois se développent, et le propriétaire, s’il a su les attendre, n’a qu’à récolter les plus riches produits. On pourrait aisément citer des communes dont les revenus en bois ont doublé, triplé et parfois décuplé depuis une trentaine d’années, leurs futaies ayant trouvé un débouché facile et une faveur toujours croissante sur le marché. Les futaies deviennent ainsi pour les communes une vraie poule aux œufs d’or. Ceci peut se réaliser également pour les taillis dans une large mesure. Combien de taillis sous futaie communaux qui aujourd’hui