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Nous avons parlé de l’avancement des sciences comme étant l’instrument du progrès par excellence, de l’enseignement supérieur, qui prépare aux luttes de la vie, de l’enseignement des collèges, qui doit conduire les hommes à travailler avec fruit pour eux-mêmes et pour la prospérité du pays ; nous ne pouvons oublier l’instruction élémentaire. D’après une opinion qui s’est propagée, la France n’aurait guère à envier à des peuples voisins que l’obligation pour tous les individus de savoir lire et écrire. L’éclat d’une nation est à un autre prix, mais nous ne reconnaissons pas moins d’une manière générale le devoir pour les gouvernemens et pour les sociétés de donner une certaine culture intellectuelle aux plus pauvres et aux plus humbles. On s’est défié de l’instruction obligatoire dans cette idée que peut-être ceux qui la prônaient étaient moins préoccupés d’un grand intérêt social que désireux de rendre possible à des gens incapables de discerner le bien du mal la lecture d’écrits qui excitent à la haine contre toute supériorité. Un autre sentiment, croyons-nous, guidera ceux qui auront la mission d’organiser l’enseignement populaire de la France. Il est indispensable sans doute d’apprendre à lire, à écrire, à compter, toutefois cette instruction est insuffisante, et ici l’insuffisance est dangereuse. Ne voit-on pas des ouvriers honnêtes et intelligens exprimer le regret de manquer d’une direction pour former leur jugement ? L’indication est précieuse : il faut qu’à l’école on s’applique, dans une certaine mesure, à l’observation et à l’expérience, qu’on s’habitue à chercher des preuves avant d’adopter une opinion. Évidemment les exercices ne sauraient porter sur autre chose que sur les élémens des sciences physiques et naturelles. Avec les idées présentes et les anciennes habitudes, beaucoup de personnes peut-être trouveront extraordinaire qu’on s’occupe d’enseignement scientifique pour les écoles primaires ; nous n’aurons pas le mérite cependant d’avoir rien imaginé. Déjà dans des écoles étrangères, en Amérique comme en Europe, on familiarise les enfans du peuple avec des notions sur la physique du globe et sur quelques faits d’histoire naturelle. Le 2 août 1871 se trouvait réunie à Edimbourg l’Association britannique, fondée en vue du progrès de la science, — une institution vieille de plus de quarante ans, aujourd’hui célèbre dans le monde entier. L’assemblée, qui comptait 2,463 personnes, acclamait le vœu que le gouvernement fût sollicité de prendre les mesures nécessaires pour introduire l’enseignement scientifique dans toutes les écoles élémentaires du royaume ; en même temps elle avait la satisfaction d’être informée qu’une députation avait déjà reçu du vice-président du conseil d’instruction publique, M. W. E. Forster, la promesse d’un concours actif, et entendu l’expression de la volonté de