un être vivant et vrai, dont l’âme rayonne doucement à travers les blancheurs du marbre. La nature est ici le vrai poète, et l’artiste n’est que l’interprète de sa pensée ; mais aussi comme il la comprend ! quel goût sûr et délicat, quelle suavité exquise, quel modelé souple et fin ! Cette sculpture est tendre sans être molle ; elle est pétrie d’amour jusque dans les moindres détails. Les jolies boucles de cheveux qui traînent sur le cou sont d’une facture et d’un sentiment délicieux. Le peu de poitrine entrevu dans l’entre-bâillement du corsage, les plis charmans de la robe collée aux épaules, jusqu’à la guipure qui en frise les bords, tout exprime un sentiment de grâce, de simplicité exquise, de douceur attendrie. Rien n’est banal pour qui sait voir la nature ; rien n’est mièvre ou mesquin pour qui n’exagère pas ses impressions et ne se fait pas un jeu de ses sentimens. M. Hiolle possède au dernier point cette vue sincère et touchante des choses, ce mélange rare d’esprit et d’émotion dont se compose la distinction vraie. Adressons-lui cependant un léger reproche. Pourquoi a-t-il placé sur le socle, juste en dessous des seins, cet écusson qui emprisonne et alourdit la taille ? Le corsage aurait bien plus d’élégance sans cette espèce de cuirasse historiée.
Le buste de Mme Compoint, par M. Millet, est encore un de ces morceaux de sculpture saine et distinguée qui, sans nulle affectation de réalisme, vous mettent en présence de la nature même. Le modèle est d’un âge mûr, les traits sont un peu gros et incorrects ; mais la tête est vivante, individuelle, d’une exécution ferme et moelleuse, fine et décidée, sans recherche des détails, sans négligence de la forme, et charmante en résumé, quoique loin d’être belle. Malheureusement il n’y a d’achevé que la tête. Le buste lui-même n’est qu’un socle vaguement ébauché, et la poitrine n’a pas l’air d’avoir été sculptée sur nature. — M. Deloye au contraire se complaît dans une représentation minutieuse et artificielle des détails. Il expose un buste en terre cuite, qui représente une femme d’un certain âge, le nez un peu pointu, avec de la fermeté dans les plans du front, du menton et des joues ; drapée dans un manteau à franges, et les cheveux en bandeaux plats, elle jette un regard de côté sous des paupières un peu tombantes. La masse de ce portrait est très bonne, mais sans finesse ni précision, et l’artiste y supplée par une imitation assez froide des procédés extérieurs de M. Carpeaux. Les cheveux, le manteau, les rides même du visage sont figurés par des moyens superficiels et calligraphiques ; la vie, qui éclate dans ce travail au premier coup d’œil, s’affaiblit à mesure qu’on le considère et qu’on en perce à jour les artifices. C’est vraiment dommage, car il y a du premier jet dans cette sculpture,