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nos connaissances, rien ne saurait remplacer les 20,000 machines fixes, les 4,000 locomotives et les 1,000 machines de bateau que la France possédait en 1864.

Réduite à ses plus simples élémens, la machine à vapeur se compose d’une chaudière où l’eau devient de la vapeur en absorbant le calorique du foyer et d’un cylindre dans lequel la vapeur, en poussant un piston, perd le calorique qu’elle avait absorbé et se résout en eau. Le piston transmet le mouvement qu’il a reçu à une roue, à une bielle ou à un balancier. Ainsi la machine et l’eau qu’elle contient ne sont, à vrai dire, que des organes intermédiaires qui servent à transformer de la chaleur en travail. Ce principe est un des plus beaux résultats de la théorie moderne de l’équivalence des forces naturelles. Seulement, quand on a voulu comparer la chaleur produite par le foyer au travail réellement exécuté par la tige du piston, on a reconnu que la plus grande partie s’en perdait en route, que l’effet utile n’était, avec de médiocres machines, que de 2 1/2 pour 1 ! 00 du travail virtuel indiqué par la théorie, avec de bonnes machines de 8 ou 10 pour 100 au maximum. Le plus puissant moteur de notre industrie ne semble plus être qu’un appareil grossier. Nombre d’inventeurs travaillent sans cesse à l’améliorer ; nous aurons occasion de citer les perfectionnemens qui leur sont dus. C’est ainsi par exemple que, depuis moins de trente ans, la quantité de combustible nécessaire pour faire marcher une locomotive a été réduite de moitié.

On le voit, l’eau n’est dans la machine à vapeur qu’un intermédiaire entre le foyer de chaleur et le piston, porteur de la force motrice ; or l’eau présente ce grave inconvénient que, si la chaudière qui la renferme vient par malheur à éclater, le liquide se répand de tous côtés et cause de cruelles brûlures à ceux qu’elle atteint. Il serait prudent de la remplacer par quelque chose de moins dangereux. De l’air chauffé à 300 degrés est inoffensif, et donne une pression d’une atmosphère, comme l’eau chauffée à 100 degrés. Un ingénieur américain, Ericson, est l’inventeur d’un moteur à air chaud que l’on a soumis à de nombreux essais ; mais l’air n’emmagasine qu’une faible quantité de chaleur sous un gros volume, d’où la conséquence que la chaudière, le cylindre et le piston doivent avoir, pour une même force, un volume plus considérable, — et puis l’air chaud brûle les garnitures de la machine, corrode les métaux, tandis que la vapeur d’eau lubréfie en quelque sorte les surfaces et diminue les frottemens. Aussi la machine à air chaud n’a-t-elle jamais réussi malgré les avantages qu’elle semblait réunir à première vue. Cependant elle s’est représentée dernièrement sous une forme simple qui lui a valu quelques succès.