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renoncer à obtenir une grande vitesse par ce moyen : il parait difficile de dépasser 10 kilomètres à l’heure ; la voiture à vapeur n’a donc sous ce rapport aucun avantage sur les voitures traînées par des chevaux. Autant qu’on en peut juger jusqu’à présent, la locomotive routière doit se borner aux transports de marchandises lourdes. Dans la plupart des cas, n’y a-t-il pas avantage alors à poser des rails sur le chemin qu’elle parcourt ? Au surplus, les pouvoirs publics se sont montrés peu favorables à ce nouveau mode d’application de la vapeur. En Angleterre, où l’intervention administrative est d’habitude si restreinte en matière de travaux publics, il est défendu aux locomotives routières de faire plus de deux lieues à l’heure dans les villes ou villages, de lâcher la vapeur en marche ou dans les stationnemens, d’employer le sifflet à vapeur ; la machine doit être précédée, à 60 mètres en avant, par un homme à pied, qui fait garer les chevaux et les voitures. Une industrie soumise à de tels règlemens a de bien faibles chances de succès.

Sans entrer dans des détails de construction qui ne seraient à leur place que dans un cours de technologie, il serait injuste de passer sous silence certaines améliorations introduites dans la fabrication ou l’usage des machines à vapeur, et dont les locomotives surtout ont profité. Personne n’ignore plus quelle révolution est. survenue dans l’industrie métallurgique depuis que la méthode Bessemer permet de fabriquer l’acier à bon marché. Les rails en acier, que les grandes compagnies introduisent sur les sections les plus fatiguées de leur réseau, coûtent moins cher aujourd’hui que les rails en fer il y a vingt ans. Aucun instrument ne profitera plus que la machine à vapeur de cette baisse de prix, puisqu’elle exige, comme condition de sécurité, d’être construite en matériaux de premier choix. L’injecteur Giffard est une invention un peu plus ancienne, à laquelle on m’a guère fait attention en dehors des ateliers, quoique ce soit l’une des plus curieuses découvertes de ces derniers temps. La chaudière, qui perd de l’eau sans cesse par évaporation, doit en recevoir du dehors à intervalles assez rapprochés ; mais il existe à l’intérieur de la chaudière une pression telle que cette eau d’alimentation ne peut y entrer que si elle est refoulée avec une certaine force. Cela se fait au moyen d’une pompe que la Machine elle-même met en jeu. Un simple ouvrier, M. Giffard, s’est avisé de faire rentrer dans la chaudière un jet de vapeur et un jet d’eau associés ensemble ; le premier entraîne le second. Cette singulière. solution d’un problème en apparence insoluble parut d’abord si extraordinaire que l’on n’y voulut pas croire. Rien n’est du reste plus commode) ; en marche ou au repos, le mécanicien n’a qu’à tourner un robinet pour alimenter sa chaudière.

Un autre perfectionnement de date récente est le renversement