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souverain des Ovas déclarait pouvoir sans doute renoncer personnellement au trafic des esclaves ; mais devait-il empêcher tout un peuple d’accroître sa richesse ? M. Hastie promettait que la richesse viendrait par d’autres sources. Un kabar étant convoqué, 5,000 personnes environ se réunirent pour exprimer l’opinion générale du peuple ; l’avis ne fut pas favorable à la proposition des étrangers. Presque aussitôt une circonstance changea la situation ; Radama parut indigné de l’audace de ses sujets : plusieurs d’entre eux avaient demandé s’il était l’esclave des Anglais. Après de nouvelles conférences avec le roi, avec les ministres ou d’autres personnages qualifiés, l’entente s’établit : le traité était arraché. Par ce traité, la confiance et une amitié sincère doivent être perpétuelles entre les deux parties ; la vente des esclaves est prohibée dans tout le pays placé sous la domination de Radama ; comme dédommagement, le gouverneur de l’île Maurice s’engage à payer annuellement 1,000 dollars en or et 1,000 dollars en argent, à fournir 100 barils de poudre, autant de fusils anglais munis du fourniment, 10,000 pierres à fusil, des habits rouges, des pantalons, des chemises, des chapeaux de soldats, des paires de souliers au nombre de 400, 12 épées de sergent avec le ceinturon, 400 pièces de toile blanche et pareille quantité de toile bleue, enfin un habillement complet, chapeau et bottes, ainsi que deux chevaux pour Radama. On ne par le pas du don d’un officier anglais, qui sera général. L’armée du roi des Ovas allait donc être équipée comme les soldats du roi de la Grande-Bretagne : sir Robert Farquhar avait remporté la victoire ; il partit pour l’Angleterre, afin de mieux jouir de son triomphe.

Maintenant c’est à la nation anglaise de profiter des avantages du traité. La société des missionnaires de Londres ne perd pas une minute ; elle s’agite, elle conçoit de vastes projets, et sans retard elle envoie quelques-uns de ses membres à Madagascar. Au débarquement, des difficultés se présentèrent ; le général Hall, qui remplaçait l’amiral Farquhar, n’avait mis aucun obstacle à la traite des esclaves, il avait cessé d’entretenir des relations amicales avec le roi des Ovas. Fort irrité de la violation du traité, Radama se souciait peu de recevoir les missionnaires. Ceux-ci commencèrent par résider à Tamatave, ouvrant des écoles, allant faire de la propagande dans les villages de la côte. En 1820, l’amiral Farquhar était venu reprendre le gouvernement de l’île Maurice ; jaloux de restaurer la bonne harmonie avec le souverain de Madagascar, il songea de nouveau à charger M. Hastie de se rendre à Tananarive en compagnie d’un missionnaire, M. Jones. Radama fit savoir que son ancien ami serait bien accueilli. Sur cette assurance, les envoyés se mirent en route ; au pied de la colline qui porte la ville, ils reçurent l’ordre