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été le premier pas dans la carrière de nos désastres. Il s’est trouvé mêlé à de grands événemens pour lesquels il n’était certainement pas fait. Son mérite est de n’avoir jamais désespéré de son pays, et il meurt sans avoir fait beaucoup profiter le Mexique d’une victoire si imprévue, qui a coûté trop cher à la France.

CH. DE MAZADE.

REVUE MUSICALE.

Nous demandions dernièrement à l’Opéra ce qu’il allait faire, et quelles étaient les conditions de sa troupe ? La question telle que nous l’avons posée reste debout ; les débuts de M. Sylva dans Robert le Diable, de M. Lassalle dans Guillaume Tell, de Mlle Arnal dans les Huguenots, n’ont répondu que d’une manière évasive. On gagne du temps, on essaie de désarmer l’opinion en ayant l’air de faire quelque chose. Nous parlerons un jour du corps de ballet, aussi vieilli, aussi caduc ; en attendant, le corps du chant continue d’être ce qu’il était il y a deux mois : c’est la troupe de l’ancienne administration, moins Mme  Marie Sass, Mlle  Nilsson, M. Faure, moins M. Devoyod, qu’on a laissé partir, et ce pauvre Colin, qu’on n’a point remplacé. Nous n’entendons décourager personne, ceux qui nous accuseraient de malveillance se tromperaient volontairement ; en fait de parti-pris, nous n’en avons qu’un, que tout le monde doit avoir : veiller au bon usage d’une subvention de huit cent mille francs par an, dont la France veut, même aujourd’hui, paver la gloire de posséder une scène lyrique de premier ordre, et qui ne peut d’ailleurs servir uniquement à grossir la fortune d’un spéculateur. Ce parti-pris, nous le maintiendrons d’autant plus que, par une déplorable ignorance de la question, ceux qui sont au pouvoir semblent avoir abdiqué toute initiative. Les responsabilités, nous ne nous lasserons pas de le dire, ne sont pas toutes pour les directeurs de l’Opéra ; elles remontent au ministre qui les a nommés et doit compte au pays de la manière dont ses fonds sont employés. Les difficultés, les embarras abondent, qui en doute ? mais ce n’est point en s’agitant ainsi dans le vide qu’on triomphera de la situation.

On a beaucoup parlé d’un récent voyage à Londres ; qu’a-t-il produit ? A-t-on seulement le Polyeucte de M. Gounod ? « Nous n’avons ni Lambert ni Molière. » M. Gounod s’est récusé, mais nous entendons raconter que M. Faure se serait montré meilleur prince et condescendrait à nous donner six mois, car, pour l’année entière, il paraît que maintenant c’est trop cher pour nous. Quant à Mlle Nilsson, son temps est plus précieux, elle n’a que vingt représentations à nous accorder ; c’est à prendre ou à laisser. Eh bien ! alors point de marché, la France n’accepte pas de ces sortes d’aumônes. En allant à Londres offrir un engagement à M. Faure et à Mlle  Nilsson, le directeur de l’Opéra remplissait galam-