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pratiquer une grande route d’Antongil à Bombétok. Par des circonstances qui attestent la naïveté des Malgaches, il devient souverain indépendant ; le gouverneur de l’Ile-de-France s’alarme, Benyouski part pour la France afin de se justifier, demande des subsides à tous les états, et obtient quelques faveurs de l’Amérique. Après avoir beaucoup erré, ce roi de hasard étant revenu en son royaume, une petite expédition préparée à l’Ile-de-France arriva pour mettre fin aux exploits de l’homme qu’on jugeait trop entreprenant. Le 23 mai 1786, Benyouski tombait frappé d’une balle.

Avant les premiers jours de la révolution, tout le monde s’inquiétait du sort de La Pérouse. Aristide Du Petit-Thouars forme le projet d’armer un navire pour faire le tour du monde à la recherche du célèbre navigateur. Son frère Aubert, un jeune botaniste, l’accompagnera en vue de la science. Pour subvenir aux frais de l’expédition, une souscription est ouverte ; naturellement elle avorte, les deux frères dépensent leur patrimoine. On était en 1792, Aristide, menacé par d’infâmes dénonciations et obligé de gagner la pleine mer, indique à son frère l’Ile-de-France pour se rencontrer. Aubert s’embarque : en arrivant, il ne trouve pas Aristide ; il ne devait jamais le revoir, — on sait la fin du capitaine du Tonnant. Aubert Du Petit-Thouars, après un long séjour à l’Ile-de-France, saisit l’occasion qui se présente d’aller à Madagascar. Parcourant les environs de Foulepointe, il étudie la végétation, et bientôt dans une forme scientifique il fera connaître en partie cette flore qui avait tant émerveillé Philibert Commerson.

L’idée d’une colonisation de Madagascar était bien persistante. En 1792, la convention chargeait un agent de visiter l’île et de choisir une position avantageuse. M. Lescalier fit cette découverte, que l’insuccès des premières tentatives antérieures devait être attribué au mauvais esprit qui y avait présidé. En 1801, Bory de Saint-Vincent reçut une mission analogue de la part du gouvernement de l’Ile-de-France. En 1804, le général Decaen s’assura des moyens de conserver là possession des côtes, déclara Tamatave chef-lieu des établissemens français, et plaça dans ce port M. Sylvain Roux comme agent général. Pendant un siècle et demi, la France avait eu la possibilité de faire de Madagascar une contrée riche et heureuse ; elle ne devait plus la retrouver. Après un silence de dix années, tout sera changé. Des événemens nouveaux et le progrès des recherches scientifiques vont nous occuper.


EMILE BLANCHARD.