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Reinhard, envoyé de France à Cassel, étaient chargés de faire au ministre de l’empereur des rapports réguliers. A côté du chef de la police westphalienne, Legras de Bercagny, une police secrète observait, pour le compte de l’empereur, le roi, la cour, les ministres et jusqu’à la police. « Mon frère, écrivait l’empereur à Jérôme, je vous envoie les réponses de l’impératrice de Russie. J’ai ouvert celle qui vous était adressée. Je n’ai pas pris la même liberté pour celle de la princesse (Catherine), parce je suppose qu’elle ne contient rien d’important; cependant je désire que vous m’en envoyiez copie. » Les lettres de Napoléon au souverain de 2 millions d’hommes étaient souvent sur ce ton : «je trouve ridicule que;... » puis c’étaient d’amers reproches sur des faits qui n’arrivaient le plus souvent à Paris qu’exagérés et défigurés. Si Jérôme voulait maintenir son autorité et protéger ses sujets contre les officiers impériaux, on lui reprochait de « porter atteinte à la dignité du nom français. » S’il y avait une rixe quelque part entre Allemands et Français, Napoléon s’irritait qu’il y eût « si peu de police dans le royaume. » Si Jérôme faisait planter les poteaux westphaliens sur la tête du pont de Magdebourg, Napoléon faisait abattre les armes royales par ses agens. Plus tard, il fera entrer sans façon ses douaniers sur le territoire westphalien et chasser les douaniers de Jérôme. Il donnera le Hanovre à son frère et le lui reprendra sans le consulter. Il réunira d’un trait de plume à la France en 1811 tout un département westphalien.

On comprend bien que Jérôme ait plus d’une fois songé, comme Louis de Hollande, à se dérober à ce royal esclavage. Dès 1808, on trouve dans sa correspondance des passages qui témoignent de cette disposition. « Si votre majesté ne peut se rendre à ma prière, je lui en adresserai une seconde, c’est de permettre que je lui remette dès à présent le gouvernement du royaume de Westphalie... Elle sait que je n’ai jamais désiré le royaume de Westphalie (12 janvier 1808). » — « Votre majesté observera qu’il ne peut y avoir en même temps deux personnes qui donnent des ordres dans un état, et que, si les autorités françaises doivent y commander, je ne puis dès lors y rester... Comment votre majesté peut-elle avoir dans les rapports qui lui sont faits par des subalternes plus de confiance que dans ceux que je lui adresse moi-même (10 juillet 1808 ? » — (c Je n’aime ni l’Allemagne ni l’Allemand... J’ai désiré sans doute d’avoir un peuple à gouverner, je l’avoue à votre majesté; mais je préfère vivre en particulier dans son empire à être, comme je le suis, souverain sans autorité. Votre nom seul, sire, me donne l’apparence du pouvoir, et je le trouve bien faible quand je songe que je suis dans l’impossibilité de me rendre utile à la France, qui au