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les conséquences en sont naturellement moins dangereuses. Personne ne sera tenté d’ajouter plus de foi qu’il ne convient à des compositions qui n’ont d’historique que le titre, à ces fantaisies de l’imagination ou du goût moderne sur des sujets empruntés tantôt aux âges légendaires, tantôt à des époques où, l’art de la gravure n’étant pas né encore, aucune information authentique, aucune image contemporaine ne pouvait être transmise à la postérité. En revanche, les renseignemens que la collection de Fontette contient à partir du règne de François Ier sont de nature à persuader les plus incrédules, à contenter les plus curieux. Estampes reproduisant les événemens de la place publique ou les cérémonies de la cour, sujets de guerre ou scènes de mœurs, satires politiques ou pièces d’imagerie populaire, tout ce qui peut faire revivre le passé et en divulguer jusqu’aux moindres secrets se trouve ici en pleine lumière et à sa juste place. Lorsque, près de cent ans plus tard, une autre collection formée sur un plan plus rigoureux encore et d’ailleurs riche de toutes les pièces postérieures au règne de Louis XV, lorsque la collection Hennin sera venue s’ajouter à celle-ci, il n’y aura plus dans l’Histoire de France par estampes constituée à la Bibliothèque aucun fait de quelque importance, aucun souvenir de quelque intérêt dont le public ne puisse trouver une image instructive ou tout au moins une utile mention.


III

L’entrée au cabinet des estampes des recueils qui avaient appartenu à Fevret de Fontette est un des épisodes les plus notables de l’histoire de ce cabinet au XVIIIe siècle ; mais la mémoire doit être conservée d’autres bienfaits et d’autres bienfaiteurs, de Michel Bégon particulièrement, dont le nom mérite d’être associé à celui que nous avons rappelé dans les pages qui précèdent. Le rapprochement d’ailleurs est d’autant plus légitime que la collection Bégon et la collection Fontette prenaient place presque simultanément en 1770 sur les rayons de la Bibliothèque, et que les deux hommes qui les avaient possédées l’une et l’autre, qui maintenant en dotaient leur pays avec la même libéralité, s’étaient trouvés dès leur jeunesse également sollicités aux studieuses recherches par leurs propres goûts et par les traditions de leurs familles.

L’origine de la collection dont Bégon se séparait ainsi au grand profit du cabinet des estampes remontait à une époque assez éloignée déjà. « A force de mettre tous les jours quelque chose de nouveau dans mon cabinet, je m’aperçois qu’il commence fort à se remplir et que j’ai bien des choses fort belles, » écrivait en 1689