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tôt l’histoire particulière et diplomatique pour l’histoire générale des états. Notre époque revient sagement aux sources provinciales qu’elle recherche, aux archives publiques qu’elle fouille, aux diplômes, aux cartulaires qu’elle imprime. Ces monumens sont pour l’histoire du moyen âge ce qu’est le dépouillement des correspondances pour une période plus rapprochée de l’histoire moderne. L’histoire des maisons seigneuriales ou souveraines n’a plus sans doute l’importance d’état qu’elle avait jadis, par exemple en un temps où l’on courait danger de la Bastille, si l’on doutait de l’identité d’origine des deux races carlovingienne et capétienne, tant inspiraient de crainte les prétentions généalogiques des maisons d’Autriche et de Lorraine à l’endroit de Charlemagne et de sa descendance mal connue ; mais cette connaissance n’en est pas moins toujours nécessaire : c’est comme le tronc du grand arbre historique du moyen âge. Tel est le caractère qu’elle garde encore en Allemagne. La maison de Zollern a voulu s’y poser comme l’héritière des Welfs suéviques, des Athic allémanniques ; la critique historique l’a dépossédée de ce prestige.

Malgré son ancienneté prouvée, la maison de Zollern n’arrive pas de si loin. Elle ne provient pas des premières couches de la grande féodalité germanique ; elle ne s’incorpore pas si profondément, quoi qu’on dise, avec la patrie allemande. Elle n’appartient point à cette classe de maisons princières qu’au sortir de la nuit obscure des IXe et Xe siècles l’histoire trouve en possession de vastes seigneuries, ou de la souveraineté territoriale, et dont l’origine héroïque est attestée par la tradition. Deux monumens locaux révèlent seulement son existence à la fin du XIe siècle. L’un est la chronique d’un moine obscur, Berthold de Constance, qui, sous l’année 1061[1], constate la mise à mort de Burckard et de Wezil de Zollern : Burckardus et Wezil de Zolorin occiduntur. Voilà tout. S’agit-il d’un assassinat ? est-ce un fait de guerre privée ? est-ce une punition de Raubrittern ? On l’ignore. Quels étaient ce Burckard et ce Wezil ? C’étaient, si l’on veut, des châtelains du Haut-Zollern, mais on ne saurait en présumer davantage. L’autre monument est l’acte de fondation d’un monastère dans la Forêt-Noire, le couvent d’Alpirsbach, sous l’an 1095. Il est suivi de deux actes confirmatifs de 1101 et de 1125. Les originaux de ces actes divers ne sont pas représentés. Trois personnages figurent dans cette fondation, Rotmann de Husin, Adelbert de Zolro et le comte Alwick de Sulz. Mus par des sentimens de religion et résolus à quitter le monde pour se vouer à Dieu, ils font donation à saint Benoît, confesseur, d’une propriété

  1. On rapporte un diplôme de l’an 1031, parmi les témoins duquel figure un Rudolff comes de Zolra ; mais le diplôme est évidemment faux. M. de Stillfried en fait l’observation, et M. Stälin partage cet avis. Tome Ier, p. 565.