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que pendant le semestre correspondant des années précédentes. Cette augmentation ; attestée par le chiffre des recettes, représentait environ 30 pour 100, près du tiers. En outre les six grandes compagnies ont commandé 12,000 wagons neufs, qui, s’ajoutant aux 120,000 wagons qu’elles possédaient déjà, porteront à 132,000 l’effectif destiné à l’exploitation des 16,233 kilomètres formant l’ensemble de leurs réseaux, ce qui représentera une proportion de 8 wagons à marchandises par kilomètre exploité.

La première déduction à tirer de ces chiffres, c’est que les compagnies françaises entretiennent un matériel qui, sauf dans les cas de force majeure, excède sensiblement les besoins de transport. Si, pendant les derniers mois de 1871, elles sont parvenues, avec un matériel réduit, à exécuter beaucoup plus de transports que pendant la période correspondante de 1869, où ce matériel était intact, cela veut dire qu’en 1869, elles étaient au large, et que, pour le service des années ordinaires, il n’y a point à redouter d’insuffisance. Elles ont dû en effet procéder à des calculs pour accroître le matériel en raison de l’augmentation du trafic, elles ont observé que cette augmentation se rapproche de celle que présente le produit des postes, c’est-à-dire de 2 1/2 ou 3 pour 100 par an, et elles ont organisé leur matériel en conséquence. Elles ont de plus la ressource de multiplier les trains et d’imposer aux wagons un service plus actif dans les périodes d’encombrement. Une seconde déduction qui mérite d’être relevée, c’est que les lignes sont en mesure de transporter un tonnage excédant de beaucoup le mouvement normal des marchandises, et qu’il n’est point nécessaires, au moins pour le moment, de créer de nouvelles lignes en concurrence avec les grandes artères du réseau. Dans la crise que l’on vient de traverser, ce ne sont point les rails qui ont manqué, ce sont les wagons qui, en raison d’événemens tout exceptionnels, ont fait défaut. Les mêmes rails auraient pu supporter au moins le double du tonnage qui a circulé sur les chemins de fer, et qui a dépassé du tiers le chiffre normal. En d’autres termes, la crise provenait uniquement de la pénurie inévitable du matériel.

On lit, à la suite du premier rapport de la commission d’enquête, un tableau indiquant le nombre des wagons possédés par chaque compagnie, et l’on y remarque des différences très considérables entre les effectifs proportionnels des diverses entreprises. Ainsi la compagnie du Nord comptait en 1870 près de 12 wagons par kilomètre exploité, et la compagnie de Lyon plus de 10 wagons, tandis que la compagnie de l’Ouest ne possédait que 5 wagons, et celle d’Orléans 3 l/2 seulement. Ces écarts sont tellement sensibles que l’on peut se demander à première vue si les entreprises qui ont l’effectif le plus restreint ne seraient point coupables de parcimonie