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villes ont failli être privées de gaz, la houille venant à manquer en Belgique ! Les chemins de fer encaissaient des recettes magnifiques, mais le désordre était partout, et le bénéfice du transit international que la France avait momentanément cédé au territoire belge était, compensé et bien au-delà par la désorganisation de l’industrie, qui ne pouvait plus compter sur des opérations régulières. Tel était le résultat de la guerre de 1870. Notre effacement commercial produisait cette universelle perturbation. Que l’on ne s’étonne donc plus des embarras qui ont compromis nos transports, que l’on se montre moins sévère à l’égard des compagnies concessionnaires, quand on voit la Belgique, nation neutre, épargnée par la guerre, souffrir de la même crise, plus fortement peut-être, avec des chemins de fer exploités par l’état.

Les transports commencent à reprendre leurs routes accoutumées ; mais, nous devons y prendre garde, la Belgique se prépare aux plus grands efforts pour retenir à son profit une partie du transit européen que les événemens ont pendant plusieurs mois détourné sur son territoire. Elle va augmenter son matériel, agrandir ses gares, ouvrir une ligne nouvelle pour établir une communication plus directe entre le port d’Anvers et la frontière allemande. Elle convoite aussi la fourniture des cotons que l’Alsace avait l’habitude d’acheter au Havre. Nul doute que les compagnies françaises portent leur attention sur cette concurrence, dont les prétentions pourraient être favorisées dans une certaine mesure par notre récente loi maritime. La question est bien digne d’attirer la sollicitude de la commission d’enquête. C’est en laissant aux compagnies la liberté la plus complète dans les combinaisons des tarifs internationaux que l’on pourra lutter contre les entreprises de la Belgique, et rendre à la France, à ses ports, à ses chemins de fer, leur ancienne et naturelle fonction d’intermédiaires entre le centre de l’Europe et les pays d’Amérique. Il faut aussi, après avoir aidé l’industrie des voies ferrées à se remettre de cette rude secousse, garantir avec fermeté les conditions économiques et financières que réclame dans le présent et surtout pour l’avenir la constitution même du réseau.


II

« Quand un service quelconque ne produit pas les résultats auxquels on s’attend, il arrive souvent que l’on ne s’en prend pas seulement aux hommes qui le dirigent ni aux circonstances exceptionnelles que subit ce service, mais à l’institution elle-même. Le désir d’un remède pousse trop loin, et l’on va jusqu’à vouloir une révolution radicale. » Ces paroles sensées ont été dites récemment par