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mènes de la vie. Ce procédé de destruction ou d’ablation organique, qui constitue une méthode brutale de vivisection, a été appliqué sur une grande échelle à l’étude de tout le système nerveux. Ainsi, quand on a coupé un nerf et que les parties auxquelles il se distribue perdent leur sensibilité, nous en concluons que c’est là un nerf de sensibilité ; si c’est le mouvement qui disparaît, nous en inférons qu’il s’agit d’un nerf de mouvement. On a employé la même méthode pour connaître les fonctions des diverses parties de l’organe encéphalique, et, bien qu’on ait rencontré ici de nouvelles difficultés d’exécution à cause de la complexité des parties, cette méthode a fourni des résultats généraux incontestables. Tout le monde savait déjà que l’intelligence n’est pas possible sans cerveau, mais l’expérimentation a précisé le rôle qui revient à chacune des portions de l’encéphale. Elle nous apprend que c’est dans les lobes cérébraux que réside la conscience ou l’intelligence proprement dite, tandis que les parties inférieures de l’encéphale recèlent des centres nerveux affectés à des fonctions organiques d’ordre inférieur. Ce n’est pas ici le lieu de décrire le rôle particulier de ces différentes espèces de centres nerveux qui se superposent et s’échelonnent en quelque sorte jusque dans la moelle épinière, il suffit de constater que nous en devons la connaissance à la méthode de vivisection par ablation organique qui s’applique d’une manière générale à toutes les investigations physiologiques. Ici le cerveau se comporte encore de même que tous les autres organes du corps, en ce sens que chaque lésion de sa substance amène dans ses fonctions des troubles caractéristiques et correspondant toujours à la mutilation qui a été produite.

Au moyen des lésions cérébrales qu’il produit, le physiologiste ne se borne pas à provoquer des paralysies locales qui suppriment l’action de la volonté sur certains appareils organiques ; il peut aussi, en rompant seulement l’équilibre des fonctions cérébrales, amener la suppression de la liberté dans les mouvemens volontaires. C’est ainsi qu’en blessant les pédoncules cérébelleux et divers points de l’encéphale, l’expérimentateur peut à son gré faire marcher un animal à droite, à gauche, en avant, en arrière, ou le faire tourner, tantôt par un mouvement de manège, tantôt par un mouvement de rotation sur l’axe de son corps. La volonté de l’animal persiste, mais il n’est plus libre de diriger ses mouvemens. Malgré ses efforts de volonté, il va fatalement dans le sens que la lésion organique a déterminé. Les pathologistes ont signalé chez l’homme des faits analogues en grand nombre. Les lésions des pédoncules cérébelleux déterminent chez l’homme comme chez les animaux les mouvemens de rotation. D’autres malades ne pouvaient marcher