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inutile pour l’enseignement pratique, et que les connaissances spéciales que les commis acquièrent à la longue par la fréquentation journalière des bureaux et des comptoirs sont suffisantes. Quelques personnes soutiennent en France la même thèse ; cependant nous avons vu que les Américains eux-mêmes, bons juges en cette matière, préparent les jeunes gens à l’intelligence des affaires commerciales dans des universités et des collèges spéciaux.

Il faut revenir sur quelques-uns des cours professés à l’institut d’Anvers pour en montrer toute l’importance et le côté éminemment élevé. Ce qu’un cours d’économie politique et de statistique, de géographie commerciale et industrielle, peut présenter d’utile et d’intéressant pour les élèves, cela se devine aisément. L’histoire des produits négociables des trois règnes, étayée d’une part sur les données de la zoologie, de la botanique ; de la minéralogie, et de l’autre sur les essais du laboratoire et les pratiques en usage dans les usines, les manufactures, ne peut manquer non plus de piquer la curiosité des jeunes auditeurs. Ne sont-ils pas destinés plus tard à trafiquer de la plupart de ces produits, à les transporter, à les chercher aux lieux d’origine ? De même pour l’étude du droit examiné dans ses principes généraux ou comme application au commerce, à la navigation, aux relations internationales : si jamais les études juridiques furent nécessaires à une profession, c’est bien à celle du négociant, puisqu’il a fallu foncier pour le commerce des tribunaux spéciaux. On comprend aussi l’intérêt du cours de législation douanière comparée, qui appelle l’attention sur les questions de protection et de libre échange, sur les différens systèmes coloniaux et les traités de commerce. Restent deux cours principaux pour lesquels l’école d’Anvers pourra revendiquer l’honneur de l’initiative, le cours d’histoire du commerce et le cours de constructions maritimes ; cela mérite quelques explications.

L’histoire de l’humanité et des civilisations est bien plutôt celle du commerce et de l’industrie que l’histoire des batailles, des conquêtes et des dynasties régnantes, comme on s’est plu trop longtemps à le croire. Dès le commencement des âges, dès l’époque de l’homme préhistorique, l’industrie et l’échange prennent naissance. L’homme fait d’abord des armes de pierre, puis de bronze et de fer, qu’il troque contre des colliers d’ambre ou des morceaux de jade ; le commerce naît, et bientôt la navigation. Arrivent les temps historiques. Les Phéniciens, les Égyptiens, les Assyriens, les Grecs, et plus loin, à l’extrême Orient, les Hindous et les Chinois, sont également remarquables comme peuples commerçans, industriels, artistes, car les beaux-arts touchent de bien près à l’industrie. Les révolutions politiques préparent les révolutions