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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 98.djvu/774

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continuèrent après son départ sous la direction de Geoffroi Du Plessis. Bérenger de Frédol, cardinal de Tusculum, le pape lui-même, firent de nouveaux efforts pour obtenir le désistement du roi relativement au procès contre la mémoire de Boniface. Tout fut inutile. Nogaret en partant avait évidemment demandé à ses collègues de se montrer inflexibles. Ils dirent au pape qu’ils avaient examiné avec messire Guillaume les réponses qu’il avait données par écrit, et que, sauf sa révérence, elles étaient vagues, obscures, qu’elles ne leur plaisaient pas, et que le roi non plus n’en serait pas content. Sur l’affaire de Boniface, ils protestèrent que le roi ne pouvait reculer jusqu’à ce qu’on eût puni les attentats commis contre lui, révoqué les faussetés émises à son préjudice, pourvu à la gloire de Dieu, à la révérence de l’église, en un mot jusqu’à ce que les cardinaux bonifaciens eussent rétracté solennellement et publiquement leurs mensonges, reconnu juste et bon le zèle de monseigneur le roi, et se fussent soumis, « eux et leurs fonctions, » à la volonté du roi. Cette dernière exigence, qui eût permis à Philippe de chasser du sacré collège tous ceux qui lui avaient fait de l’opposition, parut à bon droit exorbitante ; mais les bonifaciens étaient faibles : c’étaient pour la plupart des gens de petit état, parvœ personœ. Clément, tout en maintenant leur droit à plaider librement, distinguait soigneusement leur cause de celle de la papauté, et se préparait à les abandonner, si la nécessité d’éviter un scandale suprême l’y forçait.

Le séjour de Nogaret auprès du roi, entre son retour d’Avignon et son nouveau voyage en vue du procès qui devait s’ouvrir à la mi-carême de 1310, dut être de courte durée. Avant de partir pour cette dernière ambassade (la cinquième au moins dont il fut chargé auprès du saint-siège), il fit son testament. Nogaret y mit une sorte d’amour-propre de légiste, et, comme pour montrer ce qu’il savait faire en ce genre, voulut que la pièce eût un caractère exceptionnel. Par une faveur spéciale, le roi permit que l’acte se fît entre ses mains royales. Nogaret, à cette époque, a trois enfans, Raymond, Guillaume et Guillemette (alors mariée à Béranger de Guilhem, seigneur de Clermont-Lodève). Raymond sera son héritier universel. A Guillaume, il lègue 300 livres tournois de rente. Guillemette sera son héritière pour la dot qu’il lui a constituée en la mariant, et en outre pour 100 livres tournois une fois payées, vu que Guillemette, du consentement de son père et de sa mère Béatrix, a cédé à ses frères tous ses droits sur la succession paternelle et maternelle. Si l’un des fils meurt sans enfans séculiers, Nogaret lui substitue le survivant ou ses enfans ; à leur défaut, il leur substitue Guillemette ; à défaut, les enfans mâles séculiers de cette dernière ; à défaut, ses filles non religieuses. A défaut de descendance directe, tous les biens