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les magistrats, avertis de ces débats extérieurs, à poser prudemment la question d’orthodoxie de la lettre. Les évêques de Palestine avouèrent à leur tour que de pareils scrupules les avaient tourmentés, mais qu’à présent, grâce aux explications des légats, ils adhéraient à la lettre du pape sans restriction. Cent soixante évêques ayant opiné individuellement ou par groupes, les magistrats invitèrent les autres à se prononcer aussi; ils répondirent tout d’une voix : « Nous nous joignons à eux, nous pensons comme eux. »

Satisfaction était donnée aux légats; la lettre de Léon prenait place en Orient comme en Occident parmi les documens régulateurs de la foi ; les magistrats en restèrent là sans renoncer toutefois à leur proposition, qu’ils ne firent que différer. Pour le moment, ils ne voulurent pas troubler l’union qui régnait dans l’assemblée. Les évêques profitèrent de ces dispositions favorables pour obtenir la grâce des cinq vice-présidens du faux concile d’Éphèse, déclarés, comme Dioscore, dignes de déposition lors de la première séance, « Ils sont catholiques, criait-on de toutes parts aux magistrats, ils ont souscrit la lettre du pape (ils s’étaient hâtés de le faire en gens habiles). Les cinq ont souscrit la foi, ils pensent comme l’archevêque de Rome. Longues années à l’empereur! longues années à l’impératrice! » Le cri de pardon était à peu près général, et les magistrats crurent devoir consulter l’empereur. « Vous avez déposé Dioscore, dirent-ils aux évêques, et vous voulez absoudre ceux-ci; vous en porterez la responsabilité devant Dieu. En attendant, que l’empereur décide ! » La séance fut suspendue pendant quelques heures pour attendre la réponse du prince. Marcien laissait au jugement du concile le sort de ces cinq évêques. « Qu’en voulez-vous faire? dirent alors les magistrats. — Nous demandons qu’ils rentrent, » s’écria Anatolius le premier, et tous les autres répétèrent ce cri. « Eh bien donc ! qu’ils entrent, dirent les magistrats, vous en rendrez compte là-haut. » Quand les cinq furent entrés et se furent assis, des acclamations partirent de tous les rangs : « C’est Dieu qui l’a fait, disait-on; longues années à l’empereur! longues années aux magistrats ! longues années au sénat! Voilà l’union rétablie; voilà la paix des églises. »

Tandis que ces choses se passaient dans l’intérieur de la basilique, des pétitionnaires de haut rang attendaient à la porte le moment de présenter une requête au concile. C’étaient treize évêques d’Egypte qui n’avaient pas assisté aux séances depuis la première où leur patriarche avait été mis en cause, non plus que les autres évêques égyptiens, et qui prétendaient parler au nom de tout l’épiscopat de leur province. La veille même, ils avaient adressé à l’empereur une requête tendant à les faire dispenser de signer la lettre