constitution et sur la compétence de ce tribunal. Ne contiendra-t-il que des juges, des gens de loi ? Leur associera-t-on des ingénieurs, des financiers ? Quoi qu’il en soit, le parlement semble tout prêt à faire l’abandon de son ancienne autorité en matière de concessions ; mais il ne veut la livrer qu’à des arbitres indépendans de la couronne et du gouvernement du jour.
C’est une erreur générale de croire que le gouvernement parlementaire soit forcément un gouvernement libre. L’histoire de la convention ne montre-t-elle pas qu’une assemblée peut devenir le tyran le plus odieux, le plus impitoyable, parce que la responsabilité s’y divise, et pour ainsi dire s’y perd et s’y dissout ? Y a-t-il rien de plus pitoyable que tant d’essais du gouvernement parlementaire qui n’ont jamais abouti qu’à des dictatures plus ou moins hypocrites ? Une chambre peut, tout comme un souverain, devenir arbitraire, violente, s’engouer, s’entêter, avoir des caprices, des manies. Quel est en Angleterre le frein le plus puissant de l’omnipotence parlementaire ? Ce n’est plus la prérogative royale, ce n’est plus la chambre des lords, c’est plutôt l’autorité judiciaire. J’ai déjà montré comment le parlement se dépouille de ses attributions au profit du pouvoir judiciaire plutôt qu’au profit du pouvoir exécutif. Il y a plus : l’autorité judiciaire fixe la place de tous les organismes politiques et en arrête tous les écarts ; elle sert de nec plus ultra à tout ce qui exerce une autorité publique. La cour du banc de la reine est une quatrième puissance dans l’état ; elle a le droit de contrôle, elle empêche toutes les usurpations, celles de la couronne, celles des ministres, celles des fonctionnaires de l’état, celles des fonctionnaires municipaux. Là fut jugé le différend entre Jacques et les sept évêques, et l’histoire doit rendre cet hommage au roi, qu’il ne songea pas à pervertir la justice dans ce grand débat où sa couronne était en jeu. Les jurés furent choisis comme de coutume. Que signifie cette institution du jury aussi sacrée que l’institution parlementaire ? C’est que la nation, qui délègue tous les pouvoirs, a gardé pour soi le droit de punir. Les marchands qui vont donner leur verdict (vere dictum) sont les descendans de ces guerriers barbares qui rendaient eux-mêmes justice et qui déposaient des rois.
« La pureté et l’impartialité, dit Janius (lettre du 21 janvier 1769), dans l’administration de la justice est le lien le plus ferme par où l’on s’assure de la soumission empressée du peuple et on