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n’avait eu aucune influence sérieuse. Ainsi ces premières expériences avaient échoué, faute de sacrifices suffisans, de bonne direction, faute aussi de connaissances pédagogiques.

Cependant une œuvre privée qui naissait dans l’ombre était destinée à plus de succès. Au mois de mai 1862, il se formait à Paris une société pour l’instruction professionnelle des femmes. Elle ne comptait que 50 souscripteurs versant chacun 25 fr. par an ; avec ces ressources dérisoires, elle ouvrit le 15 octobre 1862, rue de la Perle, une école qui ne reçut d’abord que 6 élèves. Au bout de six mois, elle avait 40 élèves et 105 souscripteurs. A la fin de 1864, c’est-à-dire après deux ans d’existence, l’école, transportée rue du Val-Sainte-Catherine, instruisait 146 jeunes filles ; une succursale qui venait d’être ouverte rue Rochechouart en formait 16, en tout 152. Les demandes d’admission affluaient de Paris et de la province. Les progrès ont depuis continué. Aussi efficace s’est montrée l’instruction de l’école que le développement en avait été rapide. Outre l’enseignement général, que l’on y trouvait solide et substantiel, cet institut avait à sa naissance trois cours ou plutôt deux cours et un atelier : un cours de commerce qui avait pour objet de former de jeunes filles comme comptables, un cours de dessin dans lequel on faisait du dessin général jusqu’à ce que les jeunes filles fussent assez fortes pour être dirigées vers une spécialité, un cours de couture subdivisé en atelier de confection pour dames et en atelier de lingerie. La progression des recettes et du nombre des élèves permit d’élargir les bases de l’enseignement, de le rendre plus spécial et plus varié. Dans l’impossibilité d’ouvrir autant d’ateliers que le dessin appliqué à l’industrie contient de genres différens, l’on enseigna d’abord la gravure sur bois, et l’on eut presque immédiatement dix élèves pour ce métier productif ; puis l’on adopta la peinture sur porcelaine et les industries de goût, dites industries parisiennes, comme la peinture sur ivoire, sur écran, sur store ; considérant en outre que la multiplicité des industries et les dispositions des élèves donnent aux arts industriels une variété pour ainsi dire infinie, si quelques élèves de l’école professionnelle voulaient se consacrer à un genre non enseigné dans l’établissement, on les plaçait au dehors dans des ateliers spéciaux, sans rompre avec elles le lien d’affection et de confiance qui avait été formé pendant le cours des études générales. Ainsi organisée, l’école de la rue de la Perle donna les plus importans résultats ; il en sortit des jeunes filles bien disposées pour les luttes de la vie, et qui, placées dans des maisons de commerce ou travaillant pour des fabricans, valurent une solide réputation à l’établissement d’où elles provenaient.

Quelles sont les causes du succès de cette œuvre privée ? Il y en