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III

L’Institut agronomique de Versailles, créé par la loi du 3 octobre 1848, qui avait réorganisé l’enseignement professionnel de l’agriculture, fut supprimé par le décret du 17 septembre 1852. Il avait à peine vécu trois ans. L’institut se composait d’une école pour l’instruction théorique et d’un domaine annexe pour les études pratiques. Il était convenablement doté sur le budget de l’état ; les professeurs, élus à la suite de concours qui avaient été très brillans, jouissaient d’une légitime renommée ; il avait à sa disposition une ferme, un bon matériel, des bestiaux. Malheureusement les élèves furent peu empressés, et la dépense annuelle était assez lourde. Il nous souvient d’avoir entendu à l’assemblée législative un honorable député critiquer l’inutilité de cette dépense, dénoncer en pleine tribune la vache qui mangeait son berger, et crier haro sur un baudet récalcitrant qui tondait sans profit le pré de Versailles et gaspillait l’herbe du budget. On rit beaucoup, et l’on vota cette fois encore ; mais en France l’esprit est impitoyable, et les saillies peu consciencieuses d’un spirituel député de la Gironde ne furent pas sans quelque influence sur la décision qui supprima l’Institut agronomique. Il était facile de montrer qu’en trois ans cette école n’avait encore rien produit, de plaisanter une fois de plus sur la culture de laboratoire ou d’amphithéâtre, et de condamner, sous prétexte d’économie, une création très sérieuse. Le gouvernement commit une faute en se décourageant trop tôt et en sacrifiant l’école nouvelle aux préjugés des indifférens ou aux lazzis de-quelques gens d’esprit. L’agriculture est une science ; pour toute science, il faut un enseignement, et cet enseignement doit s’étendre à tous les degrés, en commençant par les plus hauts. Voilà ce que l’on avait compris en 1848, et ce que l’on eut le tort d’oublier en 1852.

Ce fut sous d’autres formes que le gouvernement de l’empire manifesta pour l’agriculture une sollicitude qu’il serait injuste de méconnaître. Il entretint les fermes-écoles, facilita la fondation de chaires libres d’agriculture, encouragea les publications scientifiques ; mais ce qu’il favorisa particulièrement, ce fut l’organisation des comices agricoles et des concours régionaux. Les comices fournissaient aux campagnes l’occasion de fêtes populaires, et les concoure étaient célébrés, on s’en souvient, avec une grande solennité. Il y avait dans ces réunions presque autant de politique que d’agriculture ; le gouvernement, désireux de conserver les sympathies du grand nombre, s’appliquait naturellement à rechercher les