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déjà quelque chose. Voilà le symptôme qui se dégage et se précise de plus en plus chaque jour. Peu à peu on entre dans cette voie de travaux sérieux et pratiques où le pays peut trouver les satisfactions les plus vraies, où les partis qui n’ont que des illusions et des ambitions se sentent déconcertés et impuissans, parce que leurs prétentions, leurs rêves, ne répondent nullement à l’état réel des esprits. M. Gambetta peut continuer à tout propos ses monologues pour prouver que c’est la monarchie sous toutes ses formes qui nous a conduits là où nous sommes, que la république est venue heureusement nous sauver ; les rabâcheurs du radicalisme, aidés de quelques conseillers municipaux parisiens, peuvent réchauffer leur pétitionnement pour la dissolution de l’assemblée : les uns et les autres parlent dans le vide, leurs pétitions et leurs discours ressemblent à une dissonance choquante et puérile, jurant avec la préoccupation universelle. Le laboremus de l’empereur romain est ce qui s’échappe de toutes les âmes, sinon de toutes les lèvres.

Il n’y a pas bien longtemps encore à la vérité, on ne savait trop par où prendra ce redoutable et douloureux problème de la régénération française ; maintenant on commence à le serrer de plus près et à le regarder en face sans se laisser intimider. On ne recule pas devant les besognes ingrates, les investigations sévères et les réformes décisives, devant la lutte contrôles abus contre les traditions routinières. On est pressé d’aborder les grandes questions d’où dépend l’avenir du pays. Demain ce sera la loi militaire, qu’on ne veut plus décidément ajourner, ce sera la réforme des finances, qui n’est pas moins urgente, et en attendant toutes ces commissions d’enquêtes qui ont été instituées par l’assemblée ou en dehors de l’assemblée, qui sont à l’œuvre depuis de longs mois, poursuivent leurs instructives recherches. La commission des capitulations a presque achevé ses travaux ? on a aujourd’hui sous les yeux cette pénible histoire, dont le dernier chapitre va être la mise en jugement du maréchal Bazaine ; La commission formée pour examiner tous les marchés négociés pendant la guerre a fait déjà plus de deux cents rapports. Il y a une commission des services administratifs qui n’est pas moins occupée, qui travaille, elle aussi, à la réorganisation du pays. Mettez à côté les grandes enquêtes sur le 4 septembre, sur le 18 mars : c’est toute une histoire, politique militaire, administrative, financière, de la France sincèrement, et impartialement poursuivie ; c’est l’étude servant de préface à l’action dans cette œuvre immense de reconstruction nationale, et remettant sans cesse les esprits en face de la patrie dans son passé douloureux comme dans son avenir. Sous toutes les formes, c’est la victoire souvent disputée et d’autant plus significative du sentiment des grandes nécessités publiques sur toutes les considérations et tous les entraînemens de parti ; M. le duc d’Audiffret-Pasquier vient de le dire dans cette simple et virile parole qui a fait vibrer toutes les âmes : « un