Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/663

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

philosophie naturelle, sont les arsenaux où le médecin prend ses armes pour la lutte qu’il livre à la maladie. C’est à lui d’en faire un salutaire usage et de mettre à profit les inépuisables ressources de la science par un coup d’œil prompt, un tact aiguisé et une industrie attentive. C’est à lui de saisir les indices et de ramener, dans une intuition judicieuse, l’ensemble désordonné et confus des symptômes au mécanisme déterminé qui seul les explique. Il s’acquittera de cette tâche avec d’autant plus d’aisance et de succès qu’il connaîtra mieux les vérités scientifiques qui en sont toute la raison. Or ces vérités sont dans un état d’accroissement plus rapide aujourd’hui que jamais. La Revue a entretenu souvent ses lecteurs des travaux dus aux physiologistes et aux anatomistes, contemporains, et qui ont tant agrandi la science de la vie. Le moment est peut-être venu de présenter le résumé des dernières investigations thérapeutiques, d’autant plus que depuis peu d’années elles sont entrées dans une voie nouvelle, marquée déjà par de précieuses découvertes. De récens ouvrages, publiés en France et à l’étranger, ne contribuent pas seulement aux progrès de la matière médicale, ils sont pleins de révélations sur les ressorts de la vitalité elle-même.


I

A l’origine, la pratique médicale fut confondue avec celle du sacerdoce. Les temples étaient en même temps des hôpitaux ; mais nous ne savons rien de précis sur les moyens qu’on y employait pour soulager ou guérir les malades, pas plus que sur les circonstances dans lesquelles se fit la découverte des premiers remèdes. Ce qu’il y a de positif, c’est que ces derniers étaient des plantes. Hippocrate employait l’ellébore, les semences de carthame, la racine de thapsie comme purgatifs. Il ordonnait l’oxymel et l’hydromel, il faisait des frictions et des saignées. En réalité, il usait peu de drogues ; ses moyens curatifs étaient empruntés à la diététique et à l’hygiène, dont il a établi les préceptes salutaires. L’immortel praticien de Cos croyait que les maladies tendent d’elles-mêmes à la guérison. Il admettait l’existence d’une nature médicatrice, dont le médecin doit favoriser le travail par un régime approprié. Asclépiade de Bithynie, disciple d’Hippocrate, paraît être le premier qui ait connu les propriétés narcotiques du pavot. En somme les médecins des écoles de Cos et de Cnide eurent peu de remèdes à leur disposition ; mais les progrès assez rapides de l’histoire naturelle révélèrent bientôt des vertus médicinales dans beaucoup de matières tirées des règnes organiques. Les ouvrages où Aristote et